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Republication du 2 juin 2020
La nouvelle vient de tomber : le port du masque dans les open spaces sera systématisé dans les entreprises à la rentrée, de quoi donner des envies de passer au télétravail à temps complet, en cours de test chez des géants comme Facebook. Mais si l’actualité l’incite, le concept n’est pas nouveau et bien des entreprises n’ont pas attendu une pandémie pour s’y essayer. Au début des années 2010, Yahoo avait déjà tenté l’expérience avant d’effectuer un retour en arrière quelques années plus tard. Loué pour sa flexibilité, le télétravail peut aussi être un facteur de souffrance s’il est mal mené. Selon une étude Opinion Way, 44% des salarié·e·s français·es se décrivent aujourd’hui en situation de détresse psychologique suite au confinement. Si le télétravail n’est pas la cause première, il peut devenir un facteur d’isolement pour certains et conduire à une croissance des comportements addictifs. Pour vous aider à relever ce challenge du 100% télétravail, nous avons interrogé des entreprises ayant testé ou testant ce modèle.
Repenser le management autour de la confiance et la communication
Au niveau du management, le télétravail repose sur plusieurs piliers parmi lesquels on trouve la confiance, la transparence, la bonne information et les mots justes. Vouloir tout contrôler est impossible, particulièrement dans une situation comme le Covid-19 où certains salariés se sont également retrouvés à devoir jongler avec leurs enfants. Si vous souhaitez vous rassurer, établissez des objectifs clairs, à court terme. Et dites vous, surtout, que ce besoin de confiance est réciproque. Soyez donc transparent !
Chaque collaborateur·rice doit avoir accès aux mêmes informations que ses collègues, qu’il travaille en horaires décalés ou simplement dans un pays étranger. La durée de vie de l’information doit donc être augmentée et ne pas se limiter à un partage sur Slack, surtout si elle est importante. Votre communication doit devenir asynchrone. Pour cela, vous pouvez conserver les informations importantes dans Slite ou sur Steeple et surtout, permettre à chaque collaborateur·rice d’y ajouter une note ou un commentaire.
Être explicite et fixer des objectifs clairs
À distance, “vous ne pouvez pas vous fier à des idées implicites ou à un langage corporel pour transmettre vos idées ou démarrer une discussion” , explique Christophe Pasquier de Slite, dont les salariés sont en télétravail à temps complet depuis trois ans. Il est donc primordial d’être explicite dans ses propos en établissant, par exemple, “un tableau de bord indiquant exactement ce que vous attendez du candidat” pour les recrutements. Ce besoin de précision se retrouve aussi au niveau des missions de vos collaborateurs.
“Si un manager n’est pas hyper clair sur les objectifs, le salarié ne pourra pas faire ce qu’il faut. Il faut être hyper rigoureux dans son management de base. Il faut faire redescendre les objectifs de manière objectivante” , estime Anaïs Prétot, co-fondatrice de Livementor. C’est bien ce qu’a prévu de faire la startup Wizi qui vient de passer au télétravail à 100%. Au sein de l’entreprise, “des objectifs clairs, précis et régulièrement déterminés sont donnés aux salariés, de manière à ce que chacun sache ce qu’il doit faire” , explique Julien Lozano, CEO de Wizi. Les managers envoient aux développeurs les missions à réaliser sur GitLab “avec un template à remplir et un process à respecter”. Cette clarté des missions permet aux salariés de bénéficier “d’une plus grande liberté sur les horaires de travail et les contraintes de chacun” . Poser des jalons et des deadlines est essentiel pour la motivation des salariés comme l’avancée et la réussite des projets.
Repenser les réunions
“Le télétravail révèle les maladies de l’entreprise”, estime Anaïs Prétot. Faire des réunions à 30 personnes, en attendant que chacun prenne la parole et s’exprime, est un peu surréaliste. “Chez Livementor, nous travaillons à distance comme en présentiel. Nous organisons peu de réunions, elles sont toujours courtes, orientées comme un brief” , poursuit-elle. Seuls les participants essentiels, “ayant un feedback clair à réaliser” sont présents. Des moments collectifs sont organisés pour faire un état des lieux des projets ou un point sur la stratégie globale de l’entreprise.
Chez Slite, pas de réunionnite non plus à l’horizon mais une multiplication des échanges à deux ou trois personnes. “Nous échangeons quasi-quotidiennement à deux ou trois salariés maximum, cela permet de faire un suivi régulier, d’aller plus en profondeur et de gérer les problèmes” , indique Christophe Pasquier. Malgré ces habitudes, la créativité et le brainstorming à distance demeurent compliqués à mettre en oeuvre. Chez Slite, des séminaires sont organisés tous les deux mois avec l’ensemble des salariés, installés en France et dans le monde. Un modèle que compte bien répliquer le PDG de Wizi en organisant des ce type de rencontres ainsi que des journées de formation collective.
Ne négligez pas les liens humains
De nombreuses entreprises ont mis en place des “bonjour” du matin, des cafés ou des déjeuners “au hasard” pour permettre aux salariés d’échanger entre eux en dehors du cadre de travail. La distinction entre pro et perso est alors primordiale. Proposer un abonnement ou une séance de yoga à l’ensemble de ses collaborateurs peut aussi contribuer à renforcer l’esprit d’équipe et permettre de créer des moments de cohésion sociale à distance. Plusieurs startups françaises proposent ce genre de solutions comme Steeple, IdeAll ou encore Gandee . Les séminaires, au-delà de leur objectif de brainstorming, constituent des moments de partage qui renforcent les liens et le sentiment d’appartenance à l’entreprise et à un groupe.
Le bureau chez soi, ça donne quoi ?
Selon l’étude “Mon télétravail, j’en parle”, menée par Res Publica, 88% des salariés français sont complètement ou partiellement équipés en outils de télétravail et 75% estiment “bien” les gérer. Ce qui est déjà une bonne nouvelle. Au-delà des logiciels en tout genre, il est essentiel de fournir le matériel adéquat à ses salariés. Que ce soit chez Slite, Livementor ou encore Wizi, l’octroi d’un bon ordinateur, d’un casque ou d’une chaise est très largement acté. Mais même avec ce matériel, les inégalités demeurent entre les salariés disposant d’une grande surface de vie et ceux habitant dans des espaces plus réduits.
Certaines entreprises comme Livementor ou Slite ont pris le parti d’offrir l’accès à un espace de coworking à leurs salariés. “Nous ouvrons un compte Spendesk à chacun de nos collaborateurs qui reçoit un montant prédéfini chaque mois. Une partie sert à payer l’espace de coworking, l’autre, les voyages, en France ou à l’étranger réalisés pour le travail”. Le montant alloué varie en fonction du coût de la vie de chaque pays. Et pas question de scruter au centime près chaque dépense, “ils gèrent cet argent comme si c’était le leur, pour leurs besoins” , explique Christophe Pasquier. D’ici à payer une partie de ses salariés pour qu’ils puissent bénéficier d’une pièce supplémentaire chez eux, il n’y a qu’un pas qui n’est pas encore franchi. Chez Livementor aussi, le coworking se dessine pour s’affranchir du bureau classique mais dans une optique un peu différente.
Télétravail, une partie de l’équation mais pas la solution
Après avoir sondé leurs employés, les fondateurs de Livementor ont clairement pris conscience que tous leurs collaborateurs n’avaient pas les mêmes attentes vis-à-vis de leur espace de travail. “Au départ, il existe un besoin grégaire d’être ensemble, d’avoir une communauté d’appartenance” , souligne Anaïs Prétot. Mais, une fois la trentaine arrivée, “l’expérience collective du travail laisse place à un besoin de valorisation de l’autonomie et à la volonté d’organiser son temps plus librement”. La startup spécialisée dans la formation des entrepreneurs, a décidé de tester un nouveau mode de collaboration. Elle ouvrira prochainement un hub de salariés à Aix-en-Provence pour permettre à une quinzaine d’entre eux de quitter Paris et bénéficier d’un cadre de vie plus agréable. “Nous payerons un espace de coworking au sein duquel nos collaborateurs et collaboratrices pourront se retrouver quand ils le souhaitent. Ce sera un lieu de passage où ils viendront pour rencontrer un ou une collègue, sans savoir forcément qui ce sera. Le télétravail restera libre” , poursuit Anaïs Prétot.
Le télétravail est un atout pour recruter des talents et aussi les conserver. “Si le ou la conjointe d’un salarié est muté, ce n’est pas un problème, notre collaborateur ou collaboratrice peut le suivre sans soucis” , explique Christophe Pasquier. Anaïs Prétot reconnaît, quant à elle, que Livementor a pu “signer avec des profils intéressants qui auraient demandé un salaire inenvisageable s’ils avaient dû vivre à Paris”. Le Covid-19 est peut-être en train de dessiner les débuts d’une nouvelle vision du travail à la carte où le coworking, le télétravail et les séminaires hebdomadaires deviendraient finalement la “nouvelle norme” .
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