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C’était le moment ou jamais. La dernière assemblée générale de l’association France Digitale, qui s’est tenue jeudi 18 juin, a bénéficié de la participation de deux guest stars : le ministre de l’Économie Bruno Le Maire et le secrétaire d’État au Numérique Cédric O ont tous deux répondu aux questions des membres du lobby du numérique. Quelle meilleure occasion pour remettre sur la table l’opposition de l’écosystème au contrôle renforcé des investissements étrangers en France ?
Fin avril, Bercy avait en effet annoncé que le seuil de prise de participation dans des entreprises sensibles nécessitant une autorisation de l’administration était abaissé de 25% à 10% et serait valable jusqu’à la fin de l’année. Conséquence directe de l’épidémie de coronavirus, les biotechnologies faisaient aussi leur entrée dans la liste des secteurs sensibles. Une modification qui n’est pas passée inaperçue aux yeux des investisseurs comme des startuppers. Par la voix de Lucie Basch, fondatrice de Too Good To Go présente au board de France Digitale, l’association s’est émue que cela soumette les opérations financières « à deux contrôles : l’un au niveau français, l’autre au niveau européen » mais aussi que cette « position défensive » à l’égard des investissements directs étrangers (IDE) ne plombe l’attractivité de l’Hexagone.
Pas de doublon avec l’Europe
Une crainte que Bruno Le Maire a jugée infondée, la France s’étant classée en 2019 au premier rang des pays européens les plus attractifs pour les IDE. « C’est un résultat que l’on a obtenu après trois ans d’efforts et on ne veut pas perdre cette place » , a souligné le ministre, qui a estimé que le décret publié fin avril est « une manière simple de dire aux investisseurs que s’ils ont la volonté de toucher à des technologies sensibles, nous serons vigilants » . Enfin, le ministre a rappelé que « l’outil de contrôle utilisé au niveau européen est une simple alerte mais ne nécessite pas d’accord comme celui de la France » , battant en brèche l’idée d’un double mécanisme auquel les investisseurs devraient se soumettre.
Dans un livre blanc dédié à la question, le cabinet d’avocats Dechert précise ainsi que « les nouvelles régulations européennes (datant de mars 2019, NDLR) n’introduisent pas de contrôle centralisé comme ce qui peut se faire aux États-Unis. Elles créent un mécanisme de coordination des dispositifs nationaux d’analyse des investissements directs par des investisseurs étrangers, donnant à la Commission européenne un nouveau rôle central de conseil en la matière » . La Commission peut ainsi émettre un avis sur une opération – mais n’a pas le pouvoir de s’y opposer, par exemple.
Un dispositif contraignant…
Parmi les pays européens, la France fait figure de chien de garde en la matière. Parmi les États membres, douze n’ont ainsi aucun dispositif d’analyse ou de contrôle des investissements étrangers. La France, parmi douze autres États membres, a opté pour la mise en place de garde-fous, comme l’illustre cette carte réalisée par le cabinet Dechert.
Et quels garde-fous. Avec une demande d’autorisation obligatoire pour conclure l’opération, la France fait effectivement partie des pays les plus stricts sur ce sujet, comme le rappelle le cabinet Dechert dans son livre blanc. Neuf autres pays, dont l’Italie ou le Danemark ont également fait ce choix. D’autres, comme l’Espagne, ont choisi des mécanismes plus souples, ne conditionnant pas forcément la conclusion de l’opération à une approbation étatique. Le Portugal, lui, mise plutôt sur le volontariat et la procédure n’est pas suspensive donc peut être contrôlée a posteriori. Une extrême souplesse qui a pesé dans l’attractivité du pays mais dont le manque de clarté l’empêche d’être un véritable filet à investisseurs étrangers.
… mais loin d’être le plus strict !
Oui, le dispositif de contrôle est contraignant et oui, la liste des secteurs concernés est relativement longue. Télécoms, défense ou encore infrastructures énergétiques sont tous concernés par le mécanisme d’autorisation préalable, au même titre que, dans le secteur numérique, « les activités de recherche et développement en matière de cybersécurité, intelligence artificielle, robotique, fabrication additive et semi-conducteurs » ou « l’hébergement de certaines données sensibles » . Néanmoins, pas question de faire de la France l’épouvantail à investisseurs que ses détracteurs s’empressent de dépeindre !
Ainsi, même en abaissant le seuil de prise de participation à 10% dans les secteurs concernés, la France n’est pas le pays le plus strict. L’Italie et l’Espagne ont toutes deux fixé ce seuil à… 3%. Et avec un seuil normalement fixé à 25%, l’Hexagone est même l’un des États membres les plus souples ! En effet, la Finlande, l’Allemagne et la Lettonie présentent toutes trois un seuil normal à 10% – soit le seuil « de crise » édicté par la France. Seuls trois autres pays ont opté pour un seuil à 25% : l’Autriche, la Hongrie et la Lituanie.
D’autre part, avec un délai de deux mois maximum entre le dépôt de la demande d’autorisation et la réponse de l’administration, la France n’est, là encore, pas le pays le plus contraignant. L’Allemagne, que beaucoup montrent régulièrement en exemple, a ainsi fixé le temps de réponse maximal à 90 jours, soit trois mois, tout comme la Pologne. L’Espagne est championne toutes catégories avec un délai porté à 180 jours ! Mais l’Autriche ou la Lettonie font mieux que l’Hexagone avec un mois maximum. Preuve que la France a, certes, encore une marge de manoeuvre pour gagner en attractivité mais a de solides arguments pour défendre sa première place européenne gagnée de haute lutte.
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Yalayolo Magazine