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Ne voulant pas faire un énième résumé des tendances du CES qui sont par ailleurs très bien fait ici et ici, j’ai choisi de vous écrire sur un sujet qui me touche et qui nous questionne tou·te·s en ce moment : la place des femmes dans la tech.
Un disclaimer pour commencer : j’ai tardé à publier cet article car j’ai malheureusement longuement hésité, je craignais les brimades, que mon point de vue ne soit pas légitime ou que cet article mette de l’huile sur le feu. Mais le point de vue exprimé dans cet article est le mien, issu à la fois de mes expériences personnelles et de discussions avec des amies sur place. J’ai travaillé pendant sept ans dans des milieux tech très masculins et suis donc malheureusement assez habituée au machisme et à la misogynie, j’y ai moi même contribué pendant des années sans m’en rendre compte.
Nous devons, ensemble, briser le tabou du sexisme dans le milieu de la tech et je tenais à apporter ma modeste contribution et à appeler à plus d’égalité, et plus de respect des femmes dans cet environnement dans lequel je gravite depuis tant d’années.
Le contexte !
Le CES, Consumer Electronics Show, autrement appelé la grand messe mondiale de l’innovation technologique, est un rassemblement que j’affectionne particulièrement. Peu d’évènements peuvent se vanter de rassembler autant de monde dans la tech. Ce salon me plait puisqu’il a été presque été hacké par la France, qui en mode startup nation déboule chaque année et s’y impose. Au delà de la belle image pour les journalistes, c’est une opportunité exceptionnelle de pouvoir se retrouver avec les décideurs et l’écosystème innovant français. Avoir accès à toutes ces personnes qui sont pendant une semaine, grâce au CES et au décalage horaire, entièrement ouvertes et accessibles, prêtes à discuter technologie, innovation et business. Une vraie opportunité pour le business BtoB et cela en fait évidemment pour moi un salon à ne pas rater.
Ce rassemblement incontournable se déroule à Las Vegas, surnommé Sin City (la ville du vice) où la devise est “what happens in Vegas stays in Vegas” (ce qui se passe à Vegas reste à Vegas). La ville en elle-même est en effet conçue pour vous pousser au vice. Elle objectifie la femme en toute impunité. Ici, on distribue des flyers pour vous vendre du temps avec ses dames ou dans les strip-clubs quand ce ne sont pas des femmes dénudées qui vous distribuent flyers en tous genres pour vous inciter à boire ou à jouer dans les casinos. Vous l’aurez compris, rien ne se vend avec un col roulé ici ! Une normalisation de la femme objet dans toute sa splendeur, alors qu’a contrario, l’homme objet n’est que très peu présent à Las Vegas. C’est donc dans ce contexte que nous allons nous balader pendant tout le CES avec des prospects, des clients ou des fournisseurs… et pour être honnête, c’est un contexte compliqué pour la majorité des femmes.
Entre strip-clubs, blagues lourdes et misogynie non-assumée
Il est bien connu que le business se forge dans le networking décomplexé au CES. Et les soirées strip-club où les femmes ne sont tout simplement pas conviées et où les liens amicalo-professionels se tissent (et certains deals se font) sont assez fréquentes !
Outre les activités auxquelles les femmes ne sont pas conviées, les “blagues lourdes” sont omniprésentes. Blagues et commentaires que beaucoup d’hommes se permettent de faire sur le physique, la taille et la profondeur du décolleté ou les fesses plus ou moins rebondies de la moindre femme qui passe… Ces “réflexions” ponctuent ou interrompent la majorité des conversations et j’ai même participé à des conversations qui se sont complètement mises en pause pour que mes interlocuteurs puissent regarder une femme passer. Ces hommes oseraient-ils les mêmes remarques à un événement professionnel en France ?
Et les réactions des femmes ?
S’en suit la difficulté de nos réactions en tant que femme. Personnellement, je me suis heurtée à un cas de conscience. Dois-je condamner certains discours clairement inappropriés au risque de froisser un prospect ou perdre un contact intéressant ? Cette année, désarmée, je n’ai pas su quoi faire et je n’ai donc rien fait. Je n’ai ni cautionné ni condamné. Et malheureusement, l‘absence de réaction implique la validation de ces propos.
Je me suis également heurtée à moi même. J’ai longtemps participé et ri dans cet environnement sexiste. Il y a quelques années de cela, j’aurais été celle qui prévenait mes collègues de l’arrivée d’un décolleté plongeant. Je me suis construite professionnellement dans cette ambiance. Ayant changé, je vois aujourd’hui à quel point cela impacte notre crédibilité et à quel point ces comportements sont inappropriés… Pour autant, je me demande quelle est ma légitimité à condamner des actes que j’aurais pu moi-même faire ou cautionner il y a quelques années. Les temps changent et nous avec. On s’informe, on est sensibilisé·e·s et on se construit autour de nos apprentissages, il est donc temps pour moi de ne plus laisser faire et laisser dire.
L’année prochaine, je n’hésiterai pas à condamner des propos que je trouve offensants et inappropriés. Je souhaite à l’avenir montrer à mes interlocuteurs qui oseraient les comportements ou paroles sexistes que nous sommes dans un contexte de travail, que rien n’excuse le sexisme, et surtout pas l’ambiance festive. Le CES est pour la plupart un événement professionnel et les blagues sexistes n’y ont pas plus leur place qu’ailleurs.
Il est très compliqué pour une femme au CES d’être prise au sérieux. Un exemple très concret : je suis invitée à dîner par des amis startuppers et je les retrouve donc autour d’une grande tablée avec cinq autres personnes que je ne connais pas. Petit tour de table direct où l’on nous demande si nous sommes en couple avec Flo. Je suis surprise par une telle intrusion personnelle mais nous répondons oui. Et nous rajoutons un petit fun fact puisque nous nous sommes rencontrés au CES 2017. Réponse de l’intéressé avec la tablée à son écoute : “ah bon, tu dansais où ?”. Rire gras de quelques-uns et malaise de ma part et de certain·e·s autres. Cette personne ne me connait pas et ose une remarque déplacée et sexiste. Nous sommes dans un contexte business et je ne connais presque personne autour de la table… Comment ensuite être crédible quand je parle de ma société et de mes ambitions. Voilà un aperçu des réflexions entendus au CES. (Mon top 5 en fin d’article va vous étonner ! (ou pas))
Le CES 2018 avait été ébranlé par un bad buzz très important concernant le manque de représentativité des femmes sur les panels et les keynotes. Un effort considérable a été fait cette année et il faut s’en féliciter. Malheureusement, malgré plus de femmes speakers et plus de femmes dans les allées du salon, le CES a encore du essuyer un bad buzz car après avoir donné le premier prix de son concours à une femme pour un sextoy féminin, elle a finalement été disqualifiée car le sextoy ne rentrait finalement pas dans les catégories du concours. Or, le CES est également connu pour les sex robots pour hommes et les salles de réalité virtuelle porno qui attirent les foules masculines. Une hypocrisie qui va toujours dans le même sens…
Après avoir échangé à ce sujet avec mes consoeurs, nous constatons que les remarques ou comportements sexistes sont la plupart du temps issues d’hommes de pouvoir ou du vieux monde… Nous avons très peu vécu cela avec les startuppers par exemple. Et c’est ce qui me donne beaucoup d’espoir ! Si ce sexisme permanent m’a autant choquée, c’est que je n’en ai tout simplement plus l’habitude dans mon environnement professionnel… La société est donc bien en train de changer, je perçois le progrès. Mais nous sommes encore loin de l’objectif et le CES me l’a confirmé.
Alors, que faire pour lutter contre le sexisme dans la tech ?
Le sexisme est l’affaire de tou·te·s et nous devons nous serrer les coudes pour que nous n’en soyons plus victimes, aussi bien dans un cadre personnel que professionnel (entretiens d’embauche, événements pro, networking, prospection, clôture de deals, etc.).
- En tant que femme, nous devons trouver la force de pouvoir remettre les hommes aux remarques / comportements sexistes à leur place, sans risquer de mettre en péril une relation ou un contrat.
- Les hommes ont également un rôle important à jouer et ne doivent pas rester passifs (comme j’ai pu le constater fréquemment). Souligner une remarque déplacée, appuyer les propos d’une femme qui remet un homme à sa place…
L’oppression systémique ne cessera que si nous sommes solidaires.
Pour terminer sur une note plus “légère”, voici mon top 5 (allez, top 7, je n’ai pas réussi à choisir) de la #lourdeur et du sexisme au CES de Las Vegas :
1- “Elle, elle est influenceuse mais c’est juste parce qu’elle fait la salope”
2- “J’espère que les micros étaient coupés, on était en train de noter les filles de la salle”
3- “- Nous nous sommes rencontrés au CES de Las Vegas en 2017 !
- Ah ouai, tu dansais où ?”
4- “Tu devrais sortir le décolleté et montrer tes atouts pour attirer plus de monde sur ton stand”
5- “Cheffe de projet ? Pourquoi pas l’écrire normalement ? T’es féministe ?!”
6- “C’est bien tu aies mis une jupe” commentaire à une experte qui s’apprêtait à leur faire une visite guidée.
7- “Je plaisante, j’aime ma femme hein !”
Retrouvez l’article originel d’Alexandra sur Medium.
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