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Et pourtant, vous êtes reconnu comme l’une des personnalités les plus influentes dans l’univers de la musique classique.
A.F.: Ma culture musicale est essentiellement discographique. J’ai écouté pratiquement 50 000 disques. J’ai eu beaucoup de chance, car j’ai pu appréhender la musique de façon très chronologique : Bach, Mozart, Beethoven, Brahms, avec des artistes qui ont été des géants de leur art. Quand vous écoutez les 32 sonates de Beethoven par Schnabel, les symphonies de Beethoven par Wilhelm Furtwängler, les concertos brandebourgeois de Bach par Adolf Busch, les symphonies de Brahms ou de Mahler par Bruno Walter, tout cela formate votre approche. Avec la fréquentation de ces gens, votre esthétique musicale est marquée au fer rouge. Elle vous sert ensuite de critère d’appréciation pour écouter des jeunes ou des gens moins connus. C’est grâce à Bruno Walter que j’ai pu savoir que Claudio Abbado, complètement inconnu à l’époque, allait être l’interprète de Mahler de demain.
Beaucoup d’inconnus sont devenus célèbres sous votre oreille. Comment dites-vous à quelqu’un qu’il a quelque chose de plus qu’un autre ?
A.F.: La condition artistique n’a rien à voir avec la célébrité. Vous l’avez ou vous ne l’avez pas, et ensuite vous pouvez la développer, la cultiver. Ces personnes, je les ai découvertes en les écoutant dans des concerts. Elles vous permettent d’avoir des clés. Mon approche de la musique et des compositeurs s’est faite à travers des interprètes d’exception qui m’ont donné ces clés.
Ensuite, comment avez-vous franchi le pas ?
A.F.: Tout n’est que hasard dans l’existence, il faut saisir ce hasard. Un jour, j’étais assistant à la faculté de droit d’Assas I, j’ai fait tomber une pièce de 5 francs dans l’amphithéâtre. Je me suis dit: “Il y a une acoustique formidable! Il faut faire des concerts ici.” L’amphithéâtre 1700, que l’on appelait ainsi car il disposait de 1700 places, était une salle de concert ! Alors, dans l’improvisation la plus absolue, avec mes copains, on a décidé d’en faire un. On a mis une affiche: “Demain, Samson François, Chopin”. Aucune publicité. Le lendemain, 1700 étudiants étaient présents. Je me suis d’ailleurs aperçu à ce moment-là que Chopin faisait plus recette que le code civil !
Comment avez-vous débuté votre activité de producteur, même si vous n’aimez pas ce terme ?
A.F.: Tout a commencé avec une association loi de 1901, que j’ai pu fonder grâce à mes compétences en droit public. C’est l’association qui était productrice. Moi, j’en ai été le président. En 1969, j’ai fait venir Daniel Barenboim. C’était la première fois qu’il dirigeait et jouait du piano. À l’époque, il n’était pas le chef d’orchestre qu’il est devenu. C’était l’un de ses tout premiers concerts. Je ne m’en suis pas rendu compte à l’époque, mais aujourd’hui avec le recul, je sais pourquoi tout cela a eu du succès. Parce que j’ai mêlé des artistes consacrés, les stars de l’époque – Rubinstein, Karajan, Bernstein, Elisabeth Schwarzkopf – à des petits jeunes qui débutaient, mais qui étaient des vrais artistes. Je le savais justement grâce à mon approche. Ces petits jeunes s’appelaient Maurizio Pollini, Daniel Barenboim, Alfred Brendel, Martha Argerich, Murray Perahia, Radu Lupu… C’est aujourd’hui le ghotha artistique !
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Yalayolo Magazine