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Anthony Bourbon « Avec Feed., On A Tué Le Marché De La Smart Food ! »
Deux ans après sa création, la start-up Feed. est déjà valorisée à plus de 200 millions d’euros. Une incroyable success-story. Et son fondateur, Anthony Bourbon, ne compte pas s’arrêter là : il a des ambitions à l’international et rêve de très vite atteindre le milliard d’euros de chiffre d’affaires. Rencontre.
Qu’est-ce qui vous a mené vers l’aventure entrepreneuriale ?
Anthony Bourbon : Depuis l’enfance, j’aime faire du business. Déjà à l’école, c’était toujours moi qui avais le plus de billes, de « pogs » ! Je les échangeais, je les jouais. Ensuite, j’ai fait du droit, parce que j’ai compris que ça me permettrait, non pas de dévier des règles, mais a minima de les comprendre et de pouvoir les optimiser. J’étais persuadé que cela me servirait dans le business. J’ai travaillé pour plusieurs directions juridiques de grands groupes. Je m’y suis très vite ennuyé. Faire des promesses synallagmatiques toute la journée, des tâches répétitives, ce n’était pas pour moi. J’avais mon CDI, mais, entre midi et deux et la nuit, avec des amis, on faisait du business : on achetait de l’immobilier. On découpait, on relouait, on revendait, on investissait à l’étranger.
Quel est l’élément déclencheur qui vous a poussé à créer Feed. ?
A. B. : Feed. vient justement de toutes ces activités qu’on avait au quotidien. On n’avait pas beaucoup de temps. À force de sauter des repas, j’ai cherché des alternatives pratiques, saines et abordables. J’ai réalisé qu’il n’y avait que des produits de régime sur le marché. Des produits avec 200 ou 300 calories, pour perdre du poids. Ce n’était pas ce que je cherchais. J’avais envie d’un repas complet, équilibré, qui m’apporterait tout ce dont j’avais besoin. À l’époque, j’ai vu que ça n’existait qu’aux États-Unis, mais la recette n’était pas du tout adaptée. C’était rempli d’OGM. Je me suis dit qu’il fallait faire la même chose avec des ingrédients que nos grands-mères utilisaient pour avoir le côté pratique, efficient et bon pour la santé. J’ai donc commencé à répertorier l’ensemble des besoins d’une personne standard sur les bases des préconisations de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).
Vous dites souvent « on », cela veut-il dire que Feed. a commencé avec des associés ?
A. B. : J’étais tout seul au début. J’ai appris à dire « on » parce que, dans les premières levées de fonds, si on dit qu’on est seul, ça ne passe pas. C’est un réel problème. Aux États-Unis, il y a plusieurs exemples de mono-fondeurs à la réussite incroyable comme Jeff Bezos, Elon Musk ou Steve Jobs. En France, c’est encore tabou. J’ai donc pris cette habitude de toujours dire « on ». Ça me donnait un effet de groupe, alors qu’en réalité j’étais tout seul. Ensuite, j’ai construit autour de moi une équipe spécialisée avec des médecins, des nutritionnistes, des ingénieurs en nutrition, des cuisiniers. À partir de là, tout est allé très vite. On a lancé un Instagram Feed. en janvier 2017, juste avant la première levée. Le produit n’était même pas encore fini, on ne l’avait pas complètement développé. On a ouvert les précommandes, et là, on en a eu 10 000 en une semaine. Alors qu’on n’avait pas dépensé un euro en marketing. On a compris qu’on répondait à un besoin.
Et tout va s’enchaîner…
A. B. : Plusieurs fonds d’investissement sont venus vers nous. Pour information, j’avais déjà mis des fonds propres. J’étais persuadé qu’en injectant de l’argent personnel, ça démontrait à tous les investisseurs que j’étais confiant dans mon projet. On a donc levé 500 000 euros auprès du business angel Senseii Ventures. Ensuite, beaucoup de fonds nous ont appelés. C’était un très bon choix de passer par des business angels. Je le conseille aux entrepreneurs, il ne faut pas se précipiter avec des fonds qui vont être très rigoureux. On en a besoin à une certaine étape du projet, mais au début, il faut de la flexibilité. Trois mois après, on a levé 3 millions d’euros avec Otium Capital. Et là, le succès s’est poursuivi. Chaque mois, on a multiplié notre chiffre d’affaires par deux. La seule limite qu’on avait, c’était le stock, sinon on aurait vendu encore plus. On a été obligé de relever 15 millions d’euros pour pouvoir augmenter le stock et vendre à l’international. Aujourd’hui, plus de 40 pays achètent la marque Feed. et nous avons déjà recruté plus de 60 personnes.
Où sont fabriqués vos produits ?
A. B. : Tout est fabriqué en France. On a trois usines : l’une fabrique les poudres, une autre les barres et une troisième les boissons. Cela nous permet d’être très flexibles. on a dû racheter certaines lignes de production, parce qu’on faisait beaucoup trop de volume et que ce n’était plus intéressant de les sous-traiter.
En termes de ventes, quelle est la répartition online et offline ?
A. B. : Nos ventes sont online à 70 %. C’est un véritable atout, parce qu’on accumule de la data sur les consommateurs. Et on gère les ventes online en direct, il n’y a pas d’intermédiaire. C’est une vraie force de négociation. Quand on va voir les distributeurs et qu’ils nous disent qu’ils veulent Feed., on répond : « D’accord, mais voilà nos conditions. Il n’y a pas de remise. » On ne casse pas nos prix, on ne fait pas d’opérations agressives. Feed. est déjà disponible dans plus de 3 500 points de vente (Monoprix, Franprix, Auchan, Intermarché…).
Pourquoi pensez-vous n’avoir aucun concurrent ?
A. B. : On a pris une telle avance que je ne vois pas un startupper se lancer en France. On a tué le marché. On a été tellement rapides. En un an, on a travaillé l’équivalent de trois ou quatre ans. On travaillait jour et nuit non-stop, comme des forcenés. C’était presque une obsession pour toute l’équipe. C’est impressionnant, une équipe de tueurs ! On a levé plus de 20 millions d’euros. On est présent dans toute la France. On a les meilleurs prix, les meilleurs produits, et Thierry Marx avec nous.
Quels sont vos objectifs ?
A. B. : On prévoit plus de 30 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2019. On va lancer une levée de fonds de 40 millions à 50 millions d’euros, avec des fonds étrangers pour accélérer l’internationalisation.
Atteindre le milliard d’euros de chiffre d’affaires dans cinq ans vous paraît possible ?
A. B. : Certains de nos concurrents américains font déjà plus de 200 millions avec un mono-produit. Donc si on pense mondial, qu’on ouvre des points de vente dans tous les pays et qu’on a un site qui permet de livrer très rapidement, le milliard n’est pas du tout à exclure.
Pourriez-vous décrire Feed. en trois mots ?
A. B. : Feed., c’est d’abord le produit. Un produit réfléchi avec des nutritionnistes, des ingénieurs, de grands chefs comme Thierry Marx. Ensuite, c’est une équipe. Les valeurs humaines, c’est ce qui nous permet d’être en avance. Enfin, je dirais que c’est le consommateur. Il est lié à l’aventure Feed. On avait des early adopters qui venaient au bureau et qui nous donnaient des conseils. C’est presque une société collaborative. Et nous venons de créer une fondation pour montrer que Feed., ce n’est pas seulement un repas complet, mais un nouveau lifestyle.
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