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La décision rendue par la Cour d’appel de Versailles le 22 janvier 2019 nous donne l’occasion de revenir sur les éléments clefs de la qualification des profits réalisés sur les instruments financiers acquis par les dirigeants et principaux cadres d’un groupe, dans le cadre d’opérations de type LBO en vue de les intéresser aux performances de celui-ci.
Dans cette affaire, le directeur financier du groupe avait acquis, moyennant une indemnité d’immobilisation de 15.000 euros, une option d’achat au prix unitaire d’un euro, des actions de la société qui l’employait. Le nombre des actions pouvant être achetées dépendait du taux de rendement interne obtenu par la société gestionnaire du fonds principal propriétaire du groupe.
À l’occasion de la cession de l’ensemble des titres de la société tête du groupe par le fonds d’investissement, son droit à lever son option se déclenchant, le bénéficiaire l’avait exercé et immédiatement revendu les titres sur la base d’une valeur unitaire de 3,54 euros, réalisant ainsi une plus-value. L’administration fiscale a remis en cause l’imposition de la plus-value réalisée lors de la revente, la requalifiant en salaire. Elle considérait que l’avantage consenti par l’octroi de l’option d‘achat était lié, d’une part, à la qualité de salarié au sein du groupe du contribuable et, d’autre part, à l’absence d’aléa supporté par ce dernier. En effet, elle soulignait que l’avantage consenti était modulé en fonction de la rentabilité interne de la société du groupe dont il était le directeur financier et que le nombre d’actions dont il bénéficiait, diminuerait en cas de départ comme « good leaver » moins de trois ans après la conclusion de la convention.
Elle prétendait également démontrer l’absence d’aléa capitalistique en évoquant le fait que lors de la levée de l’option, le contribuable connaissait le prix de cession et n’avait pas eu à décaisser la somme lui permettant d’acquérir lesdites actions.
La Cour a refusé de suivre l’administration fiscale en observant d’abord que le requérant n’était pas prémuni contre la perte totale de son investissement initial puisqu’il n’était pas certain que les conditions nécessaires à la levée de l’option soient remplies (à savoir, un taux interne de rendement de LBO France Gestion de 35%). Elle a également indiqué que le caractère disproportionné du gain retiré de la levée d’option d’achat par rapport à la mise initiale n’était pas « en tout état de cause, en soi de nature à démontrer l’absence d’un aléa suffisant caractérisant le risque économique pris ». Elle a, enfin, rappelé, conformément à une jurisprudence désormais bien établie en matière fiscale, que le lien entre l’octroi de l’option et le contrat de travail de son bénéficiaire n’était pas suffisant à empêcher de qualifier ce revenu de gain en capital.
Cette décision, après la décision William Saurin rendue le 17 février 2016 par la Cour administrative d’appel de Paris, et même celle, pourtant défavorable au contribuable, rendue par cette même Cour d’appel de Versailles dans sa décision Sté Financière Royal Moto France du 26 janvier 2017, nous semble souligner les trois paramètres à prendre en compte pour la qualification du revenu des management packages dans les opérations de LBO :
Le premier, et sans doute le critère le plus important, est le fait que le contribuable ait effectivement encouru un risque capitalistique qui ne soit pas « modique ». Le second est l’absence de conditions préférentielles offertes au contribuable lors de l’acquisition de la valeur mobilière servant de support au revenu. Enfin, la qualité de dirigeant ou bien le lien de service entre la détention des titres et un contrat de travail ne semble pas un critère opérant en matière fiscale.
Malheureusement, la jurisprudence sociale est sur ce point divergente, et notamment les Cours d’appel de Douai et, de Paris dans l’affaire Lucien Barrière, ont mis l’accent non pas sur le risque encouru par les dirigeants et les cadres, mais sur le lien entre leur fonction de salarié du groupe et la détention de titres ayant permis la réalisation d’un revenu jugé salarial.
Il reste à espérer que la décision prochaine de la Cour de Cassation sur le recours en cassation de la décision de la cour d’appel de Paris dans l’affaire Lucien Barrière vienne clarifier ce débat et surtout permette d’homogénéiser les analyses fiscales et sociales en cette matière.
Antoine Colonna d’Istria
Norton Rose Fulbright
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