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Alors que le CIO a reçu, le 15 février, à Lausanne, les délégations de Corée du Nord et de Corée du Sud en vue d’une éventuelle participation commune aux Jeux Olympiques d’été de Tokyo l’an prochain, les images des installations sportives des J.O. d’hiver 2018 de Pyeongchang jettent le trouble et relancent la polémique sur le gaspillage d’argent public et privé pour les grands événements sportifs internationaux. Au point que les candidats à l’organisation ne se bousculent plus. Fin d’une époque ?
On pensait en avoir fini avec les « éléphants blancs », ces infrastructures coûteuses, voulues par des pouvoirs politiques et érigées spécialement pour des Jeux Olympiques. On pensait avoir atteint le summum avec Sotchi en 2014 et on aimait croire que Rio 2016 serait le dernier exemple en date. Mais un an après les Jeux de Pyeongchang, en Corée du Sud, on apprend que les installations sportives, sorties de terre spécifiquement pour les compétitions de patinage ou de hockey à coup de centaines de millions de dollars, sont désertes et, pour certaines, en passe d’être abandonnées.
Du rayonnement international au discrédit
La raison en est que l’« après » n’a été pensé ni pour l’exploitation des sites, ni pour l’entretien des terrains, ni en termes d’investissement au service de la population locale. Cela coûte plus cher, pour les villes et pour le pays, d’en assurer le fonctionnement que de les fermer. Plus encore certaines équipes nationales, comme celle de bobsleigh, doivent aller s’entraîner au Canada…
La situation n’est pas meilleure du côté des infrastructures non sportives, elles aussi construites spécialement pour l’événement. La nouvelle ligne à grande vitesse entre Séoul et Gangneung était censée booster le tourisme mais, en Corée comme ailleurs, on ne décrète pas un intérêt soudain d’une population pour le ski ou le patinage. Sans parler de la destruction de forêts et des écosystèmes. Entre vœux pieux et rêve de prestige, l’acceptation sociale reste faible et le discrédit national et international est de plus en plus fort.
L’annonce, par les deux Corée, d’une possible candidature commune aux J.O. de 2032 témoigne cependant du rôle du sport dans le rapprochement diplomatique des deux ennemis historiques. La participation, dans des compétitions internationales, d’un nombre croissant d’équipes coréennes binationales est un signal politique fort en faveur de la paix, à l’heure où la scène mondiale est de plus en plus incertaine et insécuritaire.
Un modèle économique à repenser
Sur un plan économique, lorsqu’il s’agit d’accueillir les J.O., les nations redoutent le gouffre financier et l’explosion des coûts. Bien que le CIO, dont les exigences logistiques sont élevées pour l’accueil des délégations, finance globalement l’organisation des jeux notamment au travers de la billetterie, du marketing ou du sponsoring, les infrastructures, quant à elles, restent à la charge des Etats ou des sociétés privées. Une partie des fonds recueillie par le CIO sert aussi à financer les fédérations internationales, les comités Olympiques nationaux, en particulier au travers du programme de la Solidarité Olympique, ainsi que son propre fonctionnement dont l’image reste altérée malgré quelques réformes récentes sur la gouvernance.
L’espoir d’un changement repose sur deux fondements. Le premier vient du CIO lui-même et de son agenda 2020. Celui-ci appelle les villes hôtes des Jeux Olympiques à être mesurées en matière d’infrastructures, surtout sportives, et à s’appuyer au maximum sur les sites existants. Il appelle également à fournir un cahier des charges durable en termes sociétal et environnemental, « l’héritage ». Le second consiste à repenser entièrement le modèle économique de ces compétitions : parce que les retombées ne se décrètent pas, il faut les anticiper et penser à long terme. Une vision capitaliste éclairée et responsable est indispensable. On sait que le temps politique ne cesse de se raccourcir mais l’attente citoyenne ne peut plus être ignorée. Les populations veulent légitimement voir ce qu’ils ont à gagner, au quotidien, dans leur territoire. Pour cela, il faut créer les conditions d’une concertation sur les priorités attendues dans les retombées des Jeux, et assouplir l’organisation pour l’ouvrir à toutes les parties prenantes.
Et Paris…
C’est sur ces bases que travaille le Comité d’Organisation des Jeux Olympiques de Paris 2024 présidé par Tony Estanguet dont l’engagement a été pris de respecter le budget annoncé pour ce qui concerne l’organisation des Jeux eux-mêmes. Ce budget de 3,8 milliards d’euros devrait être entièrement couvert par l’apport du CIO de 1,5 milliard, et par 1,1 milliard provenant des recettes marketing et 1,15 milliards provenant de la billetterie.
Les infrastructures, les aménagements et les équipements devraient coûter 3 milliards d’euros dont la moitié serait couverte par des fonds privés et l’autre moitié, soit 1,5 milliard, par l’Etat et les collectivités territoriales.
Paris devrait être exemplaire en la matière : Les J.O. de Paris devraient permettre d’accélérer la réalisation de travaux d’infrastructures dans le cadre du Grand Paris et de construire des équipements qui perdureront au-delà des Jeux. De la même façon, les Jeux Olympiques permettront la construction de logements pour les athlètes qui devraient répondre à l’issue des Jeux aux besoins de la capitale et des Parisiens.
Le CIO doit donner des garanties financières aux villes organisatrices : non pas un chèque en blanc qui conduirait à faire exploser les coûts mais un accompagnement adapté. D’autant que la gestion des risques liés à la sécurité, notamment en cas d’attentat terroriste, ajoute à l’hésitation des villes et des États.
Pour les J.O. d’été de 2004, 11 villes s’étaient portées candidates et 5 ont finalement été retenues. Vingt ans plus tard, seules Paris et Los Angeles étaient en lice pour 2024 et 2028, après l’abandon des autres villes candidates. Pour les J.O. d’hiver de 2022, il ne restait plus qu’Almaty, au Kazakhstan et Pékin – où le risque écologique et social est le même que pour 2008. A ce jour, seules Milan et Stockholm postulent pour les Jeux d’hiver de 2026…
Pour que les Jeux Olympiques durent et séduisent les villes et les populations, il est temps d’innover vraiment.
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Yalayolo Magazine