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Associé de Kima Ventures, le fonds d’investissement de Xavier Niel, Jean de La Rochebrochard a commencé sa carrière en accompagnant les entreprises dans leur levée de fonds et entrée en bourse, avant de passer de l’autre côté de la barrière, en devenant Venture Capitalist. Après avoir travaillé aux côtés de Pascal Mercier (actuel Managing Partner chez Ader), il rejoint Kima Ventures en 2015 pour prendre la tête des investissements d’un des business angels les plus influents. En quoi consiste son métier de VC ? Quel profil d’entrepreneur recherche-t-il ? Quels sont les secteurs à suivre ? Conversation sans filtre.
Vous ne faites pas mystère de la passion avec laquelle vous vivez votre métier, qu’est-ce qui vous a attiré précisément dans cette voie ?
Jean de La Rochebrochard : Très tôt, j’ai été comme aimanté par l’écosystème entrepreneurial, et ceci pour la simple et bonne raison que les femmes et les hommes qui le composent me passionnent. Étant de nature plutôt réfractaire à l’autorité, je crois que je me retrouve dans ces entrepreneurs qui, d’une certaine manière, défient le statu quo. C’est aussi un environnement dans lequel on récolte rapidement le fruit de son travail : grâce aux deals qui se nouent, les entreprises se transforment, embauchent, on est à la fois dans le concret et dans une réponse immédiate à un besoin d’efficacité.
Quelles sont justement les qualités à développer pour devenir un bon VC ?
Jean de La Rochebrochard : Spontanément, je répondrai l’esprit de compétition, tant ce trait de caractère me paraît essentiel. Être un bon investisseur, ce n’est pas rester dans son bureau et attendre que les deals vous arrivent sur un plateau. Il faut se faire remarquer, trouver les entreprises sur lesquelles miser, jouer au coude à coude avec d’autres investisseurs pour remporter la mise. Ensuite, un VC doit démontrer une aptitude à coacher ses entrepreneurs, à les amener à se poser les bonnes questions pour les faire progresser. Quand je discute avec Firmin Zochetto, le CEO de Payfit (ndlr : qui vient de rentrer dans le club très prisé des licornes françaises), je n’évoque pas le futur de son produit, car j’en ai aucune idée. En revanche, je l’amène à s’interroger sur l’écart qu’il peut y avoir entre ses grandes capacités de réflexion et d’exécution qui peuvent le conduire à placer une attente excessive dans ses équipes, qui ont sans doute besoin d’être davantage accompagnées dans leur courbe de progression. Notre rôle est de percevoir tous les signaux faibles et de savoir interagir avec l’entrepreneur pour maximiser le résultat de ces échanges.
Outre le profil des entrepreneurs, qui tient une place majeure dans vos décisions, la question du timing est également essentielle. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jean de La Rochebrochard : Je fais souvent l’analogie avec la Formule 1 et la stratégie développée par chaque écurie pour les arrêts au stand, qui ont une répercussion sur le résultat de la course. Dans nos métiers, la notion de timing a un impact sur la trajectoire d’une entreprise, que ce soit pour se lancer, amorcer une levée, ou passer un cap dans les recrutements.
Comment arrivez-vous à détecter ces signaux que vous évoquez ?
Jean de La Rochebrochard : Chez Kima, nous recevons en moyenne 200 à 300 deals par semaine, ce qui nous permet de voir émerger des lames de fonds comme les NFT (Non Fungible Tokens), ces assets digitaux qu’on suit depuis plus de deux ans, ou encore les sujets relatifs à la santé mentale, pré-existants au COVID et qui ont bénéficié d’un coup d’accélérateur avec la pandémie. En revanche, il existe deux secteurs dans lesquels la notion de timing importe peu : ceux où l’information est traitée de façon disparate et où une entreprise qui propose une nouvelle solution pour l’agréger et l’exploiter sera toujours vue comme un atout, ainsi que ceux où l’attention portée au client est proche de zéro, et croyez-moi, ils sont encore nombreux !
Combien de deals signez-vous par an chez Kima ?
Jean de La Rochebrochard : Kima investit des tickets entre 100 000€ et 150 000€ dans 100 start-ups par an, composées à 90% d’entrepreneurs francophones basés en France ou à l’international. Nous sommes un partenaire de long terme, notre objectif est d’accompagner les entrepreneurs le plus longtemps possible.
Jean de La Rochebrochard : Il y a effectivement des liquidités colossales sur les marchés qui doivent être allouées, que ce soit pour financer l’immobilier, les entreprises cotées, les start-ups ou encore les infrastructures
Comment définiriez-vous l’approche avec laquelle vos menez ces opérations ?
Jean de La Rochebrochard : Il y a un ADN entrepreneurial très fort chez Kima Ventures, notamment parce que Xavier Niel est lui-même un entrepreneur. Par respect pour eux, nous cherchons à être le plus réactif possible dans nos prises de décision. Nous n’avons pas peur de nous positionner en premier sur un deal. Pour un entrepreneur, être soutenu par Kima Ventures, c’est avoir entre ses mains un formidable joker, dont on ne connaît pas forcément l’étendue de la valeur à l’entrée, mais qu’on ne regrettera jamais.
C’est-à-dire ?
Jean de La Rochebrochard : Je vais vous donner un exemple. Lorsque Marie Outtier, la fondatrice d’Aiden.ai est venue me voir en 2018, elle hésitait entre vendre son entreprise ou se lancer dans une nouvelle levée. Après deux rendez-vous avec elle, et une fois sa décision prise, je l’ai mise en relation avec deux acquéreurs potentiels, Snapchat et Twitter afin de faire monter les enchères. En soit, cela m’a pris très peu de temps, mais par l’intermédiaire du réseau de Kima, Marie a conclu une très belle vente de son entreprise avec Twitter en 2019, pour un montant qu’elle n’aurait pas atteint si elle avait mené l’opération de façon isolée.
Quelles qualités recherchez-vous chez un entrepreneur ?
Jean de La Rochebrochard : une vision, une forte capacité d’apprentissage et l’excellence dans l’exécution. L’entrepreneuriat est un marathon, il y aura forcément des moments difficiles à passer, mais ce qui va faire la différence, c’est la vélocité du dirigeant.
En quelques années, le paysages de start-ups françaises s’est transformé, passant d’une poignée d’élus à un large panel de projets à soutenir. Qu’est-ce que cela vous inspire ?
Jean de La Rochebrochard : Lorsque Kima a été lancé en 2010, les entrepreneurs français ou francophones se comptaient sur les doigts de la main, et maintenant nous sommes dépassés par l’étendue des talents à financer ! C’est une bonne chose pour l’écosystème, même si cela s’accompagne forcément d’un sentiment de frustration de ne pouvoir tout couvrir.
Depuis plus d’un an, les annonces de levées astronomiques s’enchaînent. Assiste-t-on à un phénomène de surenchère entre les investisseurs ?
Jean de La Rochebrochard : Il y a effectivement des liquidités colossales sur les marchés qui doivent être allouées, que ce soit pour financer l’immobilier, les entreprises cotées, les start-ups ou encore les infrastructures. Le COVID a bousculé tout un secteur traditionnel, qui est désormais challengé par le digital. Beaucoup d’entrepreneurs émergent avec des solutions innovantes et croissent à une vitesse folle. D’où ce sentiment de vague qu’on peut ressentir. Par un mécanisme d’offre et de demande, il y a plus de liquidités à investir que de projets exceptionnels à soutenir, donc il se crée une surenchère entre les investisseurs. Chez Kima, on estime que cette forte croissance devrait durer encore 2 ans, avant d’entrer dans une phase de correction de marché sur les 3 à 5 ans qui viennent. C’est là que les entreprises qui ont bénéficié de cet engouement, mais dont les actifs sont peu solides, risquent d’être fortement chahutées.
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