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Artiste, entrepreneur, philanthrope, globe-trotter, Didier Guillon est un iconoclaste. Le fondateur du fleuron suisse de la cosmétique, Valmont, a bâti un groupe de luxe à l’ADN unique en distillant l’art partout. Dernièrement, l’homme d’affaires a développé un concept inédit en transformant ses résidences en lieu de villégiature arty pour ses clients et fidèles. Itinéraire d’un épicurien né.
Pour raconter Didier Guillon, au-delà des nombreux portraits qui lui ont été consacrés dans la presse, il faut marcher sur ses pas. A Venise, Lausanne, Paris, Tokyo, Manhattan ou Hydra, le président et directeur artistique du Groupe Valmont regarde toujours le monde d’un œil nouveau. Un coucher de soleil, une scène de vie quotidienne, une Une du New York Times, tout l’inspire. « Etes-vous allé à Hydra ? Il faut avoir vu Hydra une fois dans sa vie ! », lance-t-il en guise d’invitation à le suivre en Grèce. On se glisse alors dans les interstices de son agenda surbooké. Didier Guillon est impatient d’une chose : capturer la réaction de ses convives à leur arrivée au port de l’île saronique…un spectacle à couper le souffle ! A mesure que la navette fluviale s’approche de l’embarcadère, on est frappé par la beauté du site, par ses maisons colorées accrochées à flanc de colline, par l’esthétique parfaite des façades et des pavements en marbre rose assortis aux échoppes. Une vision picturale ! « Bienvenue à Hydra, l’anti-Mykonos ! Un lieu où se succède des générations de peintres, sculpteurs, poètes, artistes. Le chanteur Léonard Cohen était l’un de ses visages les plus familiers. », se plaît-il à partager.
Ici, l’entrepreneur à la tête du plus luxueux groupe de cosmétiques suisse, Valmont, a trouvé le meilleur bureau pour piloter l’entreprise. Aujourd’hui, il préside principalement la Fondation du groupe tandis que Sophie Guillon, son ex-épouse, tient la barre de la société. Didier Guillon ne cache pas son plaisir de savourer ces moments de retraites artistiques tout en préparant, en douceur, la transition. Issu d’une grande famille française, il a baigné toute son enfance dans un univers d’esthètes où régnaient le goût du rare et du beau. Son père, co-fondateur du lait Mustela et grand amateur d’art, comme son arrière arrière-grand-père maternel, Charles Sedelmeyer, marchand d’art notoire de la fin du XIX, ainsi que le célèbre sculpteur Stanislas Lami, arrière-grand-père paternel, ont façonné son histoire. Parmi ses aïeux, il y a aussi une filiation avec le Général de Gaulle. Mais Didier Guillon n’évoque son prestigieux pedigree que si l’on insiste…L’homme n’est pas du genre à afficher ses médailles et autres joyaux de famille. Lui a souhaité très tôt s’affirmer, gagner l’estime de ses proches par ses propres faits d’arme.
Et puis, il ne pouvait en être autrement pour ce soixante-huitard revendiqué. Hériter, vivre dans le confort : « trop facile ! », objecte-t-il. Le meilleur moyen d’être « un homme », c’était d’entreprendre à son tour. Fin soixante-dix, après des études de Droit à la faculté de Nanterre (92), le fils de bonne famille décide de s’associer avec un camarade pour lancer sa première entreprise « Joyeuse Naissance ». Le concept ? Offrir des coffrets cadeaux aux jeunes mères pour agrémenter leur expérience achat. Didier Guillon parvient à convaincre des marques premium telles que Nestlé ou Procter & Gamble de collaborer en vue d’associer leurs enseignes à un moment-clé de la vie, la maternité. Imparable pour booster ses ventes et fidéliser. Une première étape très formatrice pour le vingtenaire. Rémunératrice aussi. Le tournant de sa carrière arrive bientôt. Son père l’invite à s’essayer à l’école suisse, là-bas les affaires bien menées peuvent être à l’origine d’empires. Il comprend qu’il doit passer la vitesse supérieure.
Fin 80, il s’intéresse de près à la marque Valmont, son ambition est d’en faire un fleuron de la cosmétique helvétique. Un sacerdoce car il y a tout à construire : l’identité de la griffe, le recrutement de blouses blanches, la création d’une filière d’approvisionnement, la stratégie de distribution, de communication…Car pour l’heure, ce nom reste associé à La Clinique Valmont, soit un établissement médical réputé né en 1905. Fondée par le Docteur Henri Auguste Widmer, un médecin ouvert aux pratiques les plus innovantes et grand amateur d’art, l’adresse basée à Montreux accueille, à ses débuts, des malades atteints de troubles de la digestion, de la nutrition et de neurasthénie. Au fil des ans, elle se spécialise dans la médecine et chirurgie esthétique, devenant The place to be des célébrités à l’instar de Coco Chanel, Louis Aragon, Claudia Cardinale ou Placido Domingo. Tous accourent pour entretenir leur capital jeunesse et profiter de l’air pur des Alpages. Didier Guillon veut développer une nouvelle entité car il pressent qu’il y a un créneau à prendre dans la cosmétologie de luxe.
Didier Guillon : “Nous ne voulions pas tomber dans ce cliché de la jolie femme sur papier glacé pour être le visage de Valmont. Nous voulions d’emblée communiquer autrement.”
Il entend bien avoir les mains libres en achetant la marque Valmont, indépendamment de la Clinique. Ce grand méticuleux veut également se laisser le temps de faire émerger « un groupe solide, crédible et novateur ». Un choix assumé, difficile par moment pour cet homme pressé, puisqu’il s’agit là de régler son pas sur celui de la science et de la recherche. Un autre monde. L’homme d’affaires secondé par son épouse Sophie Guillon, une ancienne de Sanofi Beauté et Yves Saint Laurent, s’appliquent à étudier la cellulothérapie dans toute sa complexité aux côtés de biologistes et cosmétologues suisses triés sur le volet afin de pénétrer le marché avec une gamme de produits uniques. Par une technique d’extraction « secret défense », Valmont réussit à recueillir intactes deux molécules aux vertus anti-âge remarquables : l’ADN et l’ARN qu’ils prélèvent au cœur même de la cellule. De cette manière, les produits seront enrichis de principes actifs aux vertus régénératrices décuplées. Ils intègrent par ailleurs dans la composition des crèmes l’eau des glaciers, puisée à 2 000 mètres d’altitude dans le canton de Valais, et la laitance de saumon sauvage du Canada. Des ingrédients dont ils observent les nombreux bienfaits.
La formulation des soins du visage « Prime Renewing Pack » vient concrétiser ces années d’effort. Valmont sort de la confidentialité, faisant au passage une pierre deux coups en signant l’un de ses plus grands best-sellers jusqu’à aujourd’hui. L’alchimie entre le couple contribue aussi à installer ce nouvel entrant dans un secteur de niche. Entendez par là, petit microcosme où les crèmes de 50 ml s’écoulent à 500 euros l’unité, entrée de gamme. Au nom de l’exclusivité et de l’efficacité éprouvée de ses élixirs, Didier Guillon veut aller encore plus loin que ces concurrents. Pour lui, « Valmont est un écrin qui doit être vendu dans des écrins » tels que Le Bon Marché, les Galeries Lafayette, Harrods à Londres ou Bongénie en Suisse. Et puis la griffe vaut bien la classe affaires. Alors un partenariat avec la compagnie aérienne Swiss Air est scellé durant dix ans : « C’était avant tout stratégique, nous touchions là une clientèle très sensible à son lifestyle et qui avait un fort pouvoir de prescription », confie l’entrepreneur.
D’un vol à un autre et d’un grand magasin à l’autre, le bouche-à-oreille fait son œuvre. « Valmont, c’est le gage d’une efficacité visible : quand vous commencez à utiliser nos cosmétiques, cela se voit, lorsque vous arrêtez, cela se voit aussi… Par conséquent, la confiance se crée très rapidement entre la cliente et sa crème, et cela n’a pas de prix ! Notre taux de fidélité est exceptionnel. », se félicite Sophie Guillon. Très vite, les palaces s’intéressent à la marque qu’ils convient dans leurs murs dorés, et surtout… bien fréquentés. Du Meurice à Paris, aux Airelles à Courchevel, au Plaza Athénée à New York, en passant par Constance Halaveli aux Maldives, Valmont pénètre dans l’élite de l’hôtellerie internationale pour ne plus la quitter. Il faut dire que la griffe cultive les mêmes codes que ces adresses d’exception : l’art, le design feutré, le raffinement et le culte de l’expérience client.
Didier Guillon, l’iconoclaste, a souhaité retranscrire son amour de l’art dans l’univers de Valmont. Il devient le chef d’orchestre d’un dialogue instinctif entre ces deux faces d’une même pièce à ses yeux, à travers le motto de l’entreprise : « When Art meets Beauty », (quand l’art rencontre la beauté). Pendant que Sophie la scientifique, expérimente, coordonne l’élaboration des produits, lui esquisse des concepts et travaille la matière pour façonner des pots qu’il veut présenter comme des œuvres d’art. Il s’inspire par exemple des verres de Murano qu’il reproduit sous forme de masques en miniature dans les coffrets et fragrances. Une démarche aussi naturelle que différenciante pour l’entreprise qui prend le contrepied du marché en refusant de recourir à une égérie. « Nous ne voulions pas tomber dans ce cliché de la jolie femme sur papier glacé pour être le visage de Valmont. Nous voulions d’emblée communiquer autrement. », souligne ce-dernier.
Ce grand amoureux de la Sérénissime bouillonne d’idées et se sent de franchir un cap, celui d’acquérir un espace pour s’exprimer pleinement. Venise, comme une évidence, abritera les tableaux, les sculptures, les dessins de sa collection et ceux qu’il ébauche. Mais, plus encore, il veut accélérer dans son mécénat en mettant en lumière des artistes qui le touche. Ainsi, il décide de créer un nouveau pilier au sein du groupe par le lancement de la Fondation Valmont en 2015. Le capitaine d’industrie s’offre un étage du Palazzo Bonvicini à Venise, un rêve qui consacre sa liberté artistique. La société peut se le permettre grâce à une croissance exponentielle durant quasiment trente ans d’existence. Seul ou entouré d’un collectif d’artistes, il fait de Venise le point de départ d’expositions itinérantes dans les Maisons Valmont (Munich, Paris, Hong Kong…), dans les spas de la marque ou dans des galeries prestigieuses comme à Hydra ou Berlin. L’homme revisite souvent les mythes antiques et les contes : « Des histoires apparemment simples, mais qui renferment différents niveaux de lecture dont les interprétations trouvent bien des résonances dans l’époque contemporaine. ».
Au prétexte d’allégories comme Alice au pays des merveilles, La Belle et la Bête, Janus ou Hansel et Gretchel, Didier Guillon interpelle son public sur la quête de soi, sur le besoin de retrouver son chemin en tant qu’adulte dans des métropoles en perpétuel mouvement, mais aussi sur la nécessité de renouer avec son humanité. Le ‘philanthropreneur’ a aussi à cœur de concevoir des expositions exclusivement en matériaux recyclables et de reverser des fonds à des association caritatives. La Fondation Valmont a en effet pour vocation d’être inclusive et socialement responsable. Depuis cet été, cette générosité a pris une autre forme encore, celle d’étendre sa galaxie à l’hospitalité. Hydra, justement, où la famille Guillon détient une propriété, est à présent devenu un véritable lieu de villégiature ouvert aux clients de l’enseigne ainsi qu’aux partenaires, qu’ils soient artistes, hôteliers, chefs….
Le temps d’un séjour offert par la griffe, les fidèles sont invités à mener la vie d’esthète entre découverte du terroir, plaisirs gastronomiques, visites culturelles et soins Valmont façon spa. Le tout immergés dans les œuvres d’art qui ornent la demeure familiale. C’est un véritable voyage clef en main qui attend ces guests accueillis par un maître d’hôtel aux petits soins. Derrière ce concept inédit, le désir de nouer une autre relation que par le produit. Parce que le luxe est avant tout émotion pour les instigateurs, il trouve sa pleine expression dans cette expérience quintessenciée.
Grèce, Suisse, Italie, Espagne : Didier, le peintre, le sculpteur et photographe à ses heures, poursuit également l’objectif de rapprocher sa communauté de ses expositions itinérantes, les résidences Valmont devenant l’épicentre d’un circuit artistique. Mais pas seulement. Le patriarche a jeté les bases d’un nouveau pilier de son empire cosmétique en vue de passer le flambeau à ses trois enfants, Capucine, Maxence et Valentine. Appelée prochainement à exercer un rôle plus opérationnel au côté de leur mère, Sophie Guillon, la génération montante a le challenge de pérenniser l’ADN unique du groupe.
Après avoir réussi à entreprendre en couple, le futur ‘retraité’ s’attèle à préparer la relève. Et c’est de Venise, bien sûr, qu’il suivra à distance les premiers pas de ses aînés. La ville deviendra cet hiver sa résidence à plein temps.
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