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Beuve- Méry abonde en ce sens : « Il s’est libéré en quittant Le Monde. Il a pu exploiter son talent en dehors.
« Grand homme de presse », ce n’est pas vraiment l’image qu’il a laissée à tout Le Monde, dont il a été le président du directoire de 2008 à 2010. Alain Beuve-Méry, journaliste au quotidien du soir depuis 1993 et ancien président de la société des journalistes du Monde (SRM), concède « qu’il a été un très bon journaliste économique » – il est rentré au quotidien en 1986 pour traiter des matières premières –, et qu’on lui doit « la création des pages Planètes, qui ont permis de pouvoir traiter des sujets de grande envergure dont on ne pouvait pas parler dans les pages internationales » – Fottorino avait été chargé de concevoir la nouvelle formule du quotidien en 2005. L’éloge s’arrête là. « C’était un directeur exécrable, renchérit le petit-fils du fondateur du journal, Hubert Beuve-Méry. Très individualiste. C’était surtout pour lui une formidable opportunité de préparer l’après. » Même son de cloche du côté d’Alain Minc, ancien membre du conseil de surveillance lorsque Fottorino était directeur de la rédaction, et grand adversaire de ce dernier :
« Je ne le voyais pas diriger une équipe. C’est un loup solitaire. Pas un chef de meute. » Les succès de Fottorino en tant qu’éditeur indépendant ne le font pas changer d’avis. « C’est une chose de mener dix personnes, affirme Alain Minc. C’en est une autre de diriger une rédaction de 500 journalistes. » Beuve- Méry abonde en ce sens : « Il s’est libéré en quittant Le Monde. Il a pu exploiter son talent en dehors. Comme Edwy Plenel avec Mediapart. »
Trouble période
Dans l’ombre du succès de Fottorino, il y a la descente aux enfers du journaliste Jean-Michel Dumay. Alors que Fottorino brigue en janvier 2008 la présidence du directoire, les actionnaires n’en veulent pas. Le Monde traverse alors la plus grave crise de gouvernance de son histoire. Dumay, président de la SRM, croit dur comme fer en Fottorino, et le soutient vaille que vaille. « Dumay était un pur, un juste. Si Fotto prend la tête du groupe, c’est grâce à lui », assène Beuve-Méry. Mais Dumay, chroniqueur judiciaire vanté pour sa droiture et critiqué pour son jusqu’au-boutisme – c’est en partie à cause de lui que Jean-Marie Colombani, président du directoire de 1994 à 2007, n’est pas réélu –, effraie les actionnaires extérieurs. En sous-sol, Fottorino négocie un protocole avec Minc : les actionnaires de l’époque acceptent de l’élire président, si Dumay quitte la tête de la SRM. Le 25 janvier 2008, lors d’un conseil de surveillance de plus de six heures, Dumay est poussé à la démission. S’ensuivra une mise au rebut pour lui qui a, comme bien d’autres, dénoncé (et dénoncent encore à Yalayolo Magazine) la trahison de Fottorino. Dumay est « blacklisté », mis au placard en janvier 2009, perdant son poste de chroniqueur.
Yalayolo Magazine a enquêté sur ces faits, recoupant nombreux documents et témoignages. Éric Fottorino a éludé, qualifiant Dumay « d’affabulateur ». Il nous renvoie à son livre, Mon tour du Monde (Gallimard, 2012), les mémoires de ses 25 années au quotidien. « Que ce livre reste le seul témoignage de la crise de l’époque est pour moi une terrible angoisse » réplique Alain Beuve-Méry.
Pourtant, c’est bien dans ses livres qu’il y a le plus à apprendre du personnage, dont l’histoire familiale (un père adoptif suicidé, un père biologique renié par la famille de sa mère) fait de Fottorino l’incarnation d’un personnage de roman. « Il parle peu de lui, souligne François Busnel. Pour le comprendre, il faut lire ses livres, ce que j’ai fait. C’est pour ça qu’on est amis. Il sait que je sais. »
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