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On l’appelle M. Goodvertising. Depuis la parution de son ouvrage éponyme, en 2012, Thomas Kolster parcourt le monde pour prêcher sa bonne parole : les marques doivent se concentrer sur leur purpose. Une vision qu’il réfute partiellement avec son second livre, The Hero Trap.
- Votre dernier ouvrage s’intitule The Hero Trap. De quoi s’agit-il ?
Pendant des décennies, je me suis intéressé au « purpose ». Et j’ai réalisé, d’un coup, que quelque chose clochait, que dès qu’une marque s’érigeait en messie, sauveur de l’humanité, cela se passait mal. Elle devient trop exposée aux critiques, surtout si sa démarche n’est pas complètement authentique. À la limite, cela pouvait fonctionner quand ce n’était la stratégie que de quelques organisations. Mais maintenant, il suffit de se promener dans les rayons d’un grand magasin pour avoir l’impression de rencontrer Mère Teresa, Greta Thunberg ou Nelson Mandela ! Or, les marques n’ont absolument pas vocation à changer le monde.
« Il suffit de se promener dans les rayons d’un grand magasin pour avoir l’impression de rencontrer Mère Teresa, Greta Thunberg ou Nelson Mandela ! »
- Vous dites que le changement ne doit pas commencer par le Pourquoi, mais plutôt par le Qui. Comment encourager cette empowerability ?
L’acte d’achat n’est désormais plus déclenché par le seul bénéfice produit. Avec mon premier ouvrage, Goodvertising, je démontrais que les consommateurs choisissaient, derrière un bien ou un service, les valeurs d’une marque, ce qu’elle représentait. Le souci, c’est qu’aujourd’hui toutes revendiquent de très hauts standards moraux, citoyens et environnementaux, et face à elles, les clients, de plus en plus méfiants, ne parviennent plus à faire la différence. Pour se distinguer, elles doivent aider les gens à devenir ce qu’ils souhaitent. Ne parlons plus de brand values, mais plutôt d’envies, de besoins, de challenges des clients ! Cette conviction, je l’ai encore plus ressentie lors de la pandémie. Pendant le confinement, nous avons réalisé qu’acheter ne nous rendait pas plus heureux. Une marque qui se contenterait de cette promesse est donc vouée à l’échec. Au contraire, celle qui m’accompagnera pour être en meilleure santé, plus connecté, davantage aimé ne peut pas faire fausse route. Et malheureusement, il y a en a très peu !
- Quelles marques offrent de tels élixirs de bonheur ?
Il y a cette boîte de livraisons de produits frais provenant directement de la ferme. Non seulement elle me permet de ne plus faire mes courses dans mon vieux supermarché, mais en plus, grâce à ses recettes, je suis devenu un cuisinier végétarien tout à fait correct ! Dans un autre genre, je pense à Nike qui, grâce à sa communauté de runners et ses messages personnalisés, me garde toujours motivé pour courir. Voilà toute la différence : tandis que le purpose se concentre sur le « why », l’organisation et ses leaders, le « who » place le consommateur sur le siège conducteur, au coeur des prises de décision.
- Vous dites que les marques doivent encourager les consommateurs à être les moteurs de leur vie. Comment peuvent-elles s’y prendre ?
Marc Pritchard, Chief Brand Officer de Procter & Gamble, résume bien la situation : « Même si nous sommes dans le business depuis 180 ans, des gosses de 17 ans créant des choses depuis leur garage, suscitent plus de confiance ». La communication de masse est en train de disparaître car la nouvelle génération veut clairement prendre le contrôle. C’est difficile à croire pour nous qui avons grandi, et vieilli (!), dans l’ancien monde, avec la télévision et les journaux… mais voyez, tous les jeunes, en créant des stories, en accumulant les followers et en engageant leur communauté, sont de véritables marketers ! Et plus vous leur donnerez du pouvoir, de possibilités d’interactions, plus ils s’engageront ! Et c’est logique : personne n’accepte, aujourd’hui, qu’on lui dise quoi faire. Nous avons tous besoin de nous sentir passionnés, écoutés et décisionnaires !
- L’objectif reste quoi qu’il en soit identique : faire vendre. Votre théorie du « Who » n’est-elle pas un nouveau bullshit marketing ?
[Rires] Je suis heureux que vous disiez ça. Car depuis Goodvertising, c’est une question que je me pose : « Encourager les marques à travailler leur purpose ne les aident-elles pas seulement à vendre plus de papier-toilette…? » Mais aujourd’hui, je suis convaincu : subsisteront les entreprises qui nous rendront plus heureux. Et cela ne passe pas par le seul acte d’achat… dont la satisfaction est, pour le mieux, assez éphémère. Un exemple : quand Max Vallot et Tom Daly, deux amis d’une vingtaine d’années, créent District Vision, ils ne proposent pas seulement des lunettes pour courir, mais un « mindful running », une boîte à outils dédiée aux athlètes, mêlant sport et méditation. Et ce n’est pas tout ! Le duo a aussi prévu des « running classes », des séances de méditation et même des résidences estivales.
Regardez tous ces commerces qui ferment les uns après les autres. Certes, cela cause l’indignation générale, et pourtant leur faillite est inévitable… car en leur sein, on ne fait qu’acheter. Or, ce que les consommateurs attendent, c’est de vivre des expériences, de partager, de rencontrer et de s’impliquer. Sinon, comment expliquer la popularité des magasins Respect Your Universe, dans lesquels se trouvent des salles à disposition des clients, lesquels peuvent monter, eux-mêmes, des groupes de sport. Tout doit tourner autour de cela, de nos clients, de leurs désirs, et de leurs attentes.
- Que penser alors de ces marques qui se lancent dans l’activisme citoyen ou écologique ?
Que c’est une erreur, que c’est un « Hero Trap » encore plus dangereux ! Quand Nike dit : « Believe into something even if it means sacrificing everything », c’est vraiment n’importe quoi ! Et bien la preuve que les marques, qui ont déjà épuisé toutes les potentialités du purpose, ne savent plus quoi faire pour sortir du lot. Mais elles font fausse route et devraient plutôt se recentrer sur le « Who », qui, dans ce monde post-purpose, est, à lui seul, capable de faire la différence.
- Selon vous, nous sommes déjà dans un monde post-purpose ?
Peut-être pas encore, mais j’aime être en avance [Rires]. Quand j’ai écrit Goodvertising, en 2012, personne, dans la sphère marketing, ne saisissait vraiment l’intérêt du brand purpose. Seule la petite communauté du développement durable percevait l’ampleur du phénomène. Aujourd’hui, c’est pareil. Lors de l’une des dernières conférences que j’ai faites, en Équateur, les organisateurs voulaient que je parle de Goodvertising, pensant que The Hero Trap n’était pas encore dans l’air du temps. C’est faux ! Regardez déjà dans le monde du travail : les leaders les plus inspirants sont ceux qui écoutent, qui impliquent, qui partagent, qui vous aident à grandir, à devenir meilleurs. Pourquoi le marketing devrait-il échapper à cette règle ?
« La toile s’apparente aujourd’hui à un immense supermarché seulement guidé par l’argent, la cupidité. »
- Mais alors, comment expliquer le succès phénoménal d’entreprises comme Amazon, qui, de l’avis général, n’oeuvrent pas vraiment à nous rendre meilleurs…?
À l’origine, Internet devait permettre aux hommes de se connecter les uns aux autres, d’être mieux informés, de se faire davantage entendre, et même de sortir certains pays de l’isolement. Force est de constater que nombre de ces promesses n’ont pas été tenues. La toile s’apparente aujourd’hui à un immense supermarché seulement guidé par l’argent, la cupidité. Les plus riches obtiennent les meilleurs référencements, la plus belle visibilité, sans se soucier du long terme, du vivre-ensemble. Regardez : toute la publicité digitale est engloutie par des plateformes qui ne sont pas investies au sein des pays, et qui ne soutiennent ni leurs infrastructures, ni leur vision du vivre-ensemble, ni même leur presse, pourtant socle de nos démocraties. « Bigger isn’t better »… c’est même le contraire ! Pour un auteur comme moi, c’est affreux de penser que la vente de mon livre ne dépendra que d’Amazon et de son algorithme… auquel je ne comprends rien. Et croyez-moi, je ne suis pas le seul à ne pas aimer le Monopoly !
- Comment changer cet état de fait ?
J’ai foi en notre jeunesse. Lors d’une conférence à l’école de commerce de Copenhague, j’ai demandé aux étudiants s’ils voulaient rejoindre des multinationales : seulement 30 sur un amphi de plus de 400 ont levé la main. Tandis que mes parents, et même moi, pensions que la mondialisation nous offrait une vie meilleure, un beau canapé et une voiture puissante, les jeunes y voient l’origine de nombreux maux, du changement climatique aux injustices sociales. Ils veulent aujourd’hui être acteurs du changement. Et on ne peut que s’en féliciter.
- Pendant la pandémie, de nombreuses marques se sont engagées, en produisant des masques, du gel hydroalcoolique ou en faisant des dons aux structures hospitalières. Ce faisant, elles sont apparues comme des héros. C’est cette stature envers laquelle vous les mettez en garde et qui, pourtant, a plu aux consommateurs…
La pandémie a constitué une catastrophe inédite, contre laquelle tout le monde, toutes les organisations, toutes les marques devaient se mobiliser. C’est ce qu’on attendait de tout un chacun.
- Si je comprends bien, vous êtes dorénavant M. Hero Trap ?
[Rires.] Pourquoi pas ? Ou M. Ex-Goodvertising sinon !
The Hero Trap est disponible ici.
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