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De nombreuses startups sont nées en portant, dès le départ, leurs engagements haut et fort. À l’instar de Too Good To Go, qui lutte contre le gaspillage alimentaire, ou encore de Back Market, qui sensibilise à la problématique de la surconsommation. Mais qu’en est-il des plus grandes marques qui ont eu tout le temps d’être décriées pour leurs pratiques néfastes avant de dégainer la jolie affiche engagée ou le cul de bus militant ? Peuvent-elles encore faire marche arrière et véhiculer de nouveaux messages ?
Avec l’arrivée de la crise du Covid-19, de nombreuses multinationales s’y sont en tout cas essayé, tentant de soutenir la lutte contre l’épidémie avec leurs armes, comme Coca-Cola, qui a suspendu toutes ses campagnes pour en reverser les bénéfices au combat mondial contre le virus ou Netflix, qui a “spoilé” nombre de ses programmes phares sur des affiches de rues pour inciter les gens à rester chez eux. il y a ainsi eu un déplacement de la posture des marques au sein de notre société : avant de s’adresser au consommateur·rice, ces dernières se sont adressées avant tout aux citoyens et citoyennes. Pour Caroline Marti, enseignante-chercheuse au Celsa, la crise du Covid a eu, comme toutes les crises, un effet révélateur : “les marques, et les startups, ont aujourd’hui le besoin de justifier de leur bonne citoyenneté”.
Communiquer c’est bien, s’engager c’est mieux
Mais avant de s’engager et de vouloir faire preuve de sa “bonne citoyenneté”, encore faut-il croire en ce que l’on prône et évaluer les risques de son engagement, explique Luc Wise, fondateur de l’agence The Good Company, spécialisée dans la communication des marques dites à impact. Car si la prise de position peut s’avérer payante, sur le court ou le long terme, c’est à la seule condition que la démarche soit sincère. Et à la question : faut-il communiquer pour s’engager, ou s’engager pour communiquer ? Toutes les personnes interrogées abondent dans le sens de la seconde proposition. “Lorsque la mission est honnête, claire et alignée sur les valeurs de l’entreprise et de l’équipe, ce n’est en aucun cas risqué. En revanche, si le projet est trop éloigné de la mission de l’entreprise, le risque c’est celui de la dilution du message ou d’être accusé de greenwashing.” explique Pierre Boucly, directeur marketing chez Too Good To Go.
Hublo, startup proposant une plateforme de mise en relation de professionnel·le·s de santé aux établissements médicaux, a pu par exemple effectuer un pivot en lançant une solution solidaire et gratuite baptisée “Renfort Covid” pour connecter bénévoles et établissements de santé. En moins d’un mois, ce sont plus de 60 000 volontaires qui se sont inscrits et 6000 établissements qui ont bénéficié de ce service. Il a fallu réorienter toute la stratégie de communication autour de cette opération, qui était parfaitement alignée avec la mission initiale de la société, ce qui lui a permis d’éviter certains reproches.
Questionner sa mission et ses valeurs…
Avant de communiquer, c’est donc le coeur même de ses actions qu’il faut auditer, comme le souligne Thibaud Hug de Larauze CEO de Back Market : “Aujourd’hui, les marques sont obligées d’être transparentes, il y a une révolution de la communication et on ne peut plus raconter n’importe quoi. Et tant mieux, car cela oblige les entreprises à prendre de vraies directions. Il faut prendre le taureau par les cornes, et travailler sur son ADN et sa mission, avant de se lancer pour capter des consommateurs.”
Un avis que partage Luc Wise, “Pour prendre l’exemple de Nike, qui s’est engagée pour le mouvement Black Lives Matter -et qui a vu son cours être chahuté en Bourse de ce fait-, c’est une marque qui peut se permettre d’afficher son soutien, car cela fait des années que sa communication met en avant des athlètes afro-américains”. D’après lui, la recette d’une communication engagée réussie tient sur 4 P : la Pérennité de l’engagement, l’adéquation avec le Positionnement, le discours de Preuve et la Pugnacité. Et la preuve, ce n’est évidemment pas un discours qui l’apporte. Intermarché s’est ainsi fait railler pendant la crise pour avoir remercié ses salarié·e·s pour leurs efforts via une campagne, sans augmenter leurs salaires. La chaîne a, depuis, rectifié le tir avec son carnet de chèques.
et sensibiliser sans culpabiliser
Ce sont bien les actions que jugent et qui influencent dans leurs décisions les consommateurs et consommatrices, que l’on parle des conditions de production des produits, du traitement réservé aux employé·e·s ou encore des engagements, respectés, de la marque. Selon Thibaud Hug de Larauze, on observe un éveil qui touche à tous les domaines. “Avant d’être des consommateurs, nos clients sont des citoyens. Il y a donc une réelle prise de conscience que ce qui compte pour l’un touche forcément aussi quelqu’un d’autre”. Mais attention à l’autre revers de la communication engagée : la culpabilisation des consommateurs et consommatrices. “Nous pourrions communiquer sur l’empreinte carbone ou la dette engendrée par l’achat d’un téléphone neuf, mais nous préférons insister – avec humour – sur les capacités de nos téléphones reconditionnés” comme en témoigne la campagne de détournement des affiches Apple de la marque en 2019. Et Gaëlle Legris, cofondatrice de l’agence de communication Léon, de conclure “Si la notion d’engagement va avec la notion de sacrifice, de privations, les stratégies de communication ne fonctionneront pas”. Attention donc, même dans une communication engagée, à jouer sur les bons leviers.
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