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Sophie Chénel a rejoint l’entreprise familiale il y a 26 ans et dirige aujourd’hui Procédés Chénel, une PME dédiée à la transformation du papier en décors imaginés par ses clients et créateurs de tous horizons.
Passionnée par l’univers du papier, elle s’investit aujourd’hui avec son équipe et ses partenaires dans la recherche de solutions plus responsables, en particulier pour le recyclage de ses fabrications.
Vous représentez la quatrième génération de l’entreprise. Quelle est son histoire ?
C’est une longue histoire d’hommes et de transmission, démarrée en 1896 et avec des hauts et des bas. D’un métier de menuisier à celui d’installateur d’exposition, c’est finalement Guy Chénel, mon père, architecte de formation, qui va faire renaître une des petites filiales, Procédés Chénel International, à partir de 1991. Il va notamment inventer ce papier unique au monde, qui est un papier ignifugé.
Personnellement, j’ai toujours rêvé de « reprendre » l’entreprise familiale (un terme amusant qui sous-entend que j’en aurais été dépossédée avant). Quand j’étais adolescente, je travaillais au département Décoration pendant les vacances. C’était l’émerveillement de réaliser ces grands panneaux avec le pinceau de martre et écheniller les plaques d’adhésif coupées par des machines pilotées par des hommes en blouse blanche. Visiter les parcs d’exposition et les entrepôts de matériel avec mon père, parcourir le Salon de l’Enfance et toutes ces expositions fascinantes… C’est sûrement pour cela que j’ai tenté d’entrer à l’école d’architecture. Malheureusement une ambiance très machiste et peu respectueuse de l’humain m’a très vite fait abandonner ce projet.
Aujourd’hui, je dirige cette PME d’une vingtaine de personnes avec une grande fierté. Notre chiffre d’affaires annuel est de 3,5 millions d’euros avec un marché à la fois français et international (35 % du CA).
Votre slogan est Architecture de Papiers. Pouvez-vous nous en dire plus ?
On peut dire que nous sommes une sorte de boîte à outils pour les créateurs. Nous proposons 4 familles de produits principalement en papier : des cloisons, des plafonds, des luminaires, du mobilier et toute sorte de petits accessoires en papier. Tous ces éléments sont modulables, adaptables, transformables et personnalisables.
Nos clients ? Ce sont les créateurs qui imaginent un décor : des architectes, des designers de stands mais aussi d’espaces et d’objets, des organisateurs d’événements. En fait, c’est toute une communauté créative qui souhaite déclencher une émotion et la restituer avec des installations éphémères ou durables. Nous collaborons avec des architectes et designers de renom (Jean Nouvel, Paola Navone, François Azambourg…).
Notre spécificité et, ce qui fait la différence sur ce marché, c’est notre offre de papier non feu unique au monde ! Il est fabriqué en France avec une grande diversité de matériaux possibles et aussi de couleurs : calque, kraft, papiers diffusants, fibreux, argentés, perforés, en nid d’abeille… Ce papier ignifugé est le matériau idéal pour remplacer les structures bois des salons et installer des faux plafonds en toute sécurité.
L’innovation est au cœur de notre stratégie de développement et nous avons déposé plus de 50 brevets. Mon père a appliqué son expertise technique d’architecte sur les matériels d’exposition, plancher technique, stand à étage, tribune, box pour animaux, puis techniques de plafond, de cloison, de luminaire et de PLV. Quand les machines n’existent pas, nous les fabriquons, parfois avec plus d’intuition que de raison. Ces dernières années, nous sommes très sensibles aux enjeux du recyclage.
Quelles sont vos initiatives en termes de développement durable ?
Chaque année, nous mettons sur le marché 30 tonnes de Drop® Paper. Ce n’est pas vraiment du papier mais un composite à base de fibre de verre, de polyester et de cellulose. Malheureusement, il ne se recycle pas. Avec nos 3 tonnes de chutes en interne qui s’ajoutent aux dizaines de tonnes de décors périmés, il nous a paru plus que nécessaire de travailler sur une solution de recyclage.
Et cette solution, nous l’avons trouvée ! Il s’agit du Drop®Cake que nous fabriquons avec nos chutes de Drop®Paper auxquelles on ajoute des déchets de polyéthylène également en floc. L’ensemble est pressé à chaud et transformé en une plaque rigide de 9 mm d’épaisseur avec laquelle on peut construire d’autres décors. En vrai, le Drop® Cake ressemble un peu à un millefeuille ! Sorti en tout début d’année 2020, ce produit innovant est très bien accueilli : il est lauréat du prix Innov’up par la BPI et a également reçu le prix de l’innovation par le magazine d’architecture allemand AIT.
Notre motivation est triple : contribuer au respect de notre environnement, offrir à nos clients une solution de recyclage de ce qu’ils inventent, nous faire plaisir et créer autour de nous une chaîne de production vertueuse.
Chaque année nous organisons la School Paper, en offrant nos déchets à une douzaine d’écoles de design et d’architecture intérieure afin que les étudiants réalisent un projet en binôme le temps d’une journée et selon une thématique. L’occasion pour un jury de professionnels de saluer ces jeunes talents et de créer des connexions. Cela nous a également donné l’idée d’organiser une exposition autour du Drop® Cake !
Quelle est la particularité de cette exposition ?
Le projet So Drop sera présenté sous la direction artistique de Sophie Larger, designer et professeure à l’Ensad. Sophie a invité 20 designers, architectes, artistes plasticiens à s’emparer de nos plaques de Drop Cake pour créer un objet, du mobilier, des sculptures, des outils… Une exposition très originale à découvrir dans notre showroom à partir du 28 juillet 2020 !
En tant qu’entreprise industrielle, quelles seraient vos préconisations pour concilier innovation et développement durable ?
Le constat est alarmant : il y a une totale absence de collecte des produits manufacturés en France. Je rêve d’un réseau où il serait facile de collecter puis de recycler. Les entreprises et les particuliers auraient accès à une base de données pour savoir quoi faire de leurs déchets manufacturés. Je pense que nous avons à la fois les idées, les innovations et les ressources humaines pour le créer en France. Il s’agit toutefois d’un projet conséquent et qui concerne de nombreuses industries. Nous avons besoin de soutiens, notamment au niveau gouvernemental, pour donner l’impulsion.
Chez Procédés Chénel, nous sommes très fiers d’avoir créé le Drop® Cake qui va dans ce sens de développement durable. Pouvoir s’émerveiller devant les créations de nos clients en sachant qu’elles pourront avoir une seconde vie, voilà qui motive toute notre équipe au quotidien.
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