[ad_1]
Pour les entrepreneur·e·s, la période actuelle est doublement anxiogène : nous sommes inquiets pour nous et nos proches, mais aussi pour nos entreprises, nos salarié·e·s, nos clients. Un mois d’arrêt d’activité ou d’activité partielle peut représenter une blessure fatale pour nombre de structures et un coup d’autant plus sévère à l’économie nationale et mondiale. C’est donc le moment de mettre en place en urgence des mesures de sauvegarde, mais il est tout aussi urgent de questionner et repenser enfin notre système économique, notamment les bases du financement des entreprises, pour construire des modèles plus sains et durables.
Tandis que les gouvernements sont particulièrement réactifs via des mesures économiques de soutien qui vont jusqu’à faire écrire Natixis sur la fin du capitalisme néolibéral, les fonds d’investissement sont également réactifs en gelant tous leurs investissements. Si cela s’avère prudent du point de vue d’un investisseur, cela peut aussi nuire à long-terme aux espoirs de reprise économique. Bien qu’utile pour certaines entreprises, ce modèle classique et dominant aurait-il en fait un rôle sociétal négatif ?
Il y a un an, The New York Times consacrait un long article au rejet du modèle du venture capital par un nombre croissant de startups. La journaliste évoque “l’effet foie gras” provoqué par les “toxic VCs” , qui alimentent fortement les startups en capital pour qu’elles puissent croître de façon agressive, parfois aux dépends de la pérennité de leur modèle économique. »L’argent intensifie les succès mais aussi les échecs.”
Si les startups qui ne parviennent pas à tenir le rythme de l’hyper-croissance sont les premières victimes de ce modèle qui vise quelques réussites éclatantes pour d’innombrables échecs, ce ne sont malheureusement pas les seules. Le venture capital cherche sa rentabilité dans sa sortie du capital, et donc dans l’investissement des investisseurs suivants.En 1998, un peu avant la crise de la bulle Internet, le magazine Fortune notait : “le secret inavoué des venture capitalists est qu’ils peuvent avoir de très belles réussites même si la valeur de la majorité des entreprises de leur portefeuille chute lors de leurs introductions en bourse. »
Enfin et surtout, le fait de subventionner des entreprises non-rentables pour qu’elles prennent le marché se fait nécessairement au détriment des entreprises rentables qui l’occupaient. L’innovation oui, mais à quel prix ? Aujourd’hui, des voix s’élèvent pour promouvoir des modèles alternatifs de financement plus éthiques, pour les entreprises financées, et pour le monde qui nous entoure.
Un mouvement de fond en quête d’alternatives
Aux États-Unis, des entrepreneur·e·s et des fonds d’investissement se fédèrent via le mouvement Zebras Unite pour proposer des modes de financement alternatifs aux entreprises. Parmi eux, la possibilité de racheter le capital investi en fonction du chiffre d’affaires et la revenue based finance (RBF). “Le modèle du venture capital est pertinent pour une minuscule fraction d’entreprises. Nous ne pouvons pas nous laisser induire en erreur et penser que cela est le futur de l’entrepreneuriat” , précise Mara Zapeda, à l’origine du mouvement.
La RBF ou “financement en échange de royalties” consiste à financer une entreprise qui verse en contrepartie un pourcentage de son chiffre d’affaires à ses financeurs. Il s’agit d’une innovation financière en pleine croissance aux États-Unis. Lighter capital, acteur historique de la RBF, vient d’annoncer avoir passé le cap des 200 millions de dollars investis depuis sa création via ce modèle. Même Stripe, leader mondial des services de paiement, a lancé son offre de financement en RBF en 2019.
En France elle est moins connue mais prend de l’ampleur sur le segment de l’investissement participatif. En 2019, elle représentait déjà 25,6 % des projets financés (contre 15 % en 2018). 1 projet sur 4 en investissement participatif est financé par ce modèle sur des plateformes comme We do good ou Vendée’Up.
Un outil financier pour gérer la crise et créer de la solidarité économique
Pourquoi la RBF représente-t-elle une bonne base pour faire face à une crise ? D’abord parce qu’elle s’adapte par nature aux aléas rencontrés par les entreprises financées : en cas de crise et de stagnation, voire d’arrêt de l’activité, pas besoin de formalités compliquées pour alléger les engagements financiers. Dans le cadre de la crise sanitaire du Covid-19, l’initiative de la Fédération Bancaire Française de permettre le report de six mois des échéances de crédit des entreprises est une excellente mesure. Avec la RBF, cela est déjà inclus dans les modalités : l’entreprise paye en fonction du chiffre d’affaires qu’elle réalise. S’il y a une baisse d’activité, cela se traduira par une baisse automatique des versements de royalties, qui restent toujours proportionnels au chiffre d’affaires réalisé.
Ensuite, parce qu’elle implique un alignement des intérêts entre les investisseurs et l’entreprise : les flux sont réguliers, en tant qu’investisseur je suis intéressé tous les trimestres par des royalties proportionnels au niveau d’activité et non par une valorisation théorique. Je peux contribuer activement au développement de l’activité en faisant connaître l’entreprise auprès de potentiels clients et avoir un impact direct sur ma rentabilité. L’entreprise doit quant à elle stabiliser son modèle économique pour assurer ces versements réguliers, qui amènent à leur tour plus de liquidités pouvant êtres réinvesties.
Enfin, sous la forme de l’investissement participatif, elle crée de forts liens de solidarité économique. En investissant dans une entreprise près de chez moi, j’ai un intérêt direct à dépenser mon argent chez elle plutôt que dans une autre. On imagine aisément par exemple l’incitation à faire mes achats chez le commerçant que j’aurai aidé à s’installer ou à passer un coup dur comme celui vécu aujourd’hui par la fermeture administrative. Les entreprises peuvent elles aussi investir dans d’autres entreprises, pour soutenir des partenaires-clé ou l’activité économique locale.
Dernier avantage non négligeable : le modèle est simple à mettre en place grâce à sa simplicité contractuelle et aux moyens informatiques modernes de gestion des flux. Cela la rend accessible à toute personne souhaitant s’y essayer dès 10 €.
On manque de business angels en France ? Et si nous étions tous et toutes les investisseurs potentiels de nos entreprises ?
Jean-David Bar est CEO et co-fondateur de We Do Good
[ad_2]
Yalayolo Magazine