[ad_1]
Rarement une marque de vêtements n’a suscité un tel engouement. Le livre « Brand Success » de Marc Drillech explique ce succès : d’un côté l’orchestration de la rareté des articles et la difficulté de se les procurer. De l’autre, des collaborations inédites qui sont une marque de fabrique. Extrait.
L’histoire de Supreme débute en 1994, lorsque l’anglais James Jebbia ouvre sa première boutique sur Lafayette Street, dans le quartier, pas encore à la mode, situé au sud de l’île de Manhattan, à New York. Il souhaite offrir aux skateurs des vêtements de qualité, loin des coupes trop amples et des jeans baggys alors en vogue. Rapidement, le lieu devient un point de rendez-vous branché, à la frontière entre la galerie d’art et le skateshop. Mais à la différence de ce dernier, les vendeurs ne poussent pas à la consommation et bon nombre de curieux se retrouvent à la boutique avec le sentiment de faire partie de « l’underground new-yorkais ». La sortie en 1995 du film Kidsde Larry Clark, phénomène générationnel sur une jeunesse en quête de sensations fortes sur fond de skate, va construire la légende de la marque, car certains des acteurs ont été repérés parmi les clients ou les employés de la boutique. Dès sa première collection – notamment un t-shirt emblématique avec une photo de Robert de Niro extraite du film Taxi Driver-, Supreme maîtrise parfaitement les codes qui feront d’elle une marque à part. D’abord son logo: un rectangle rouge avec l’utilisation de la police Futura Heavy Oblique immédiatement identifiable, qui s’inspire largement du travail de l’artiste Barbara Kruger. Puis le nom, « Supreme », qui serait tiré de l’album « A Love Supreme » de John Coltrane. Mais c’est surtout sur sa capacité à entretenir la rareté que James Jebbia va construire la légende de la marque: « Si je sais que je peux vendre 600 pièces, je vais en fabriquer 400. » Tout au début, dans son magasin, Supreme interdisait même à ses clients de toucher les articles.
Une forte communauté de clients
La marque sait créer le manque. Mais derrière l’idée de fabriquer en petites quantités se cache en réalité une stratégie de rationalité: pas de stock, donc une prise de risque plus légère. Et à chaque nouvelle collection, des centaines de clients font la queue pendant des heures. À peine achetées, les pièces se revendent à prix d’or et sont mises en vente sur le web au même moment qu’en boutique. En quelques minutes, tout est écoulé, et certains petits malins programment des robots pour essayer d’acheter un maximum d’articles. Certains achètent un article uniquement pour se prendre en photo avec un t-shirt Supreme et s’afficher ainsi sur les réseaux sociaux. Puis, ils revendent l’article instantanément au triple de son prix, voire plus. Certains t-shirts, comme ceux mettant en scène Kate Moss ou Neil Young, vendus initialement autour de 50 dollars, coûtent plus de 1500 dollars dans certaines boutiques spécialisées. En quelques années, Supreme est devenue la marque iconique de la revente en ligne de vêtements. La marque est devenue, plus ou moins contre son gré, un symbole ostentatoire. Elle a capté une clientèle qui était l’apanage classique des marques de luxe: si vous portez du Supreme, c’est que vous en avez les moyens, et surtout que vous savez comment vous procurez ses articles. Aucune marque de prêt-à-porter n’avait jusqu’alors provoqué un tel engouement. Il existe même des tutoriels pour expliquer comment se procurer des articles Supreme en ligne…
Du marketing…
Outre cette commercialisation intelligente, la marque sait créer l’événement à travers des collaborations sans cesse renouvelées. La première, qui date de 1994, année de création de la marque, relève du marketing sauvage. Supreme a apposé son logo sur un cliché de Kate Moss, alors égérie de Calvin Klein. Partout dans les rues de New York, les auto-collants du rectangle rouge Supreme se sont retrouvés collés sur les affiches Calvin Klein. Lorsque Calvin Klein a porté plainte, cela a permis à la marque Supreme de sortir de l’anonymat à peu de frais. Huit ans après, le t-shirt sérigraphié reprenant l’affiche était mis en vente, cette fois légalement. Très vite, la marque s’est affichée, plus ou moins sauvagement, à travers des clichés de nombreux artistes, comme Terry Richardson, Lady Gaga, Mike Tyson, la grenouille Kermit, Lou Reed, etc. À ce jeu de guérilla marketing, Supreme a été l’une des plus habiles. Comme ce fut le cas pour de nombreuses marques de skate, Supreme n’a jamais négligé l’importance de l’auto-collant, un outil pas cher qui peut facilement augmenter votre notoriété, et n’a jamais utilisé les canaux de communication traditionnels.
…à la collaboration
De nombreuses marques ont ainsi développé des pièces en série limitée avec Supreme. D’un côté, de grandes marques s’achètent de la street credibility, de la culture de rue et du cool; de l’autre, Supreme augmente son aura. On peut citer celles réalisées avec Nike, Vans, The North Face, Levi’s, etc. Mais la plus emblématique fut celle avec Louis Vuitton en 2017 qui allie « l’excellence du style street new-yorkais et du savoir-faire français ». L’autre grande force de Supreme, c’est de proposer d’innombrables articles sur lesquels trône fièrement son logo. Et si vous n’avez pas les moyens de vous acheter une veste pour homme, vous pourrez vous rabattre sur un disque dur ou un pointeur laser. Une simple brique a ainsi été éditée lors de la collaboration avec le rappeur américain Gucci Mane en référence à son groupe Brick Squad. Une forme de contradiction pour une marque qui entretient la rareté. Mais elle n’en est pas à un paradoxe près. Grâce à sa parfaite maîtrise de la guérilla marketing, et sachant créer l’envie, Supreme est devenu le symbole d’une génération de fashion addicts, à la frontière de différentes cultures: skate, hip-hop, punk. Son créateur a su casser les barrières entre le luxe et le prêt-à-porter. Les articles mis en vente, bien que rares, sont loin des tarifs pratiqués dans les grandes maisons de haute couture, mais l’incroyable effervescence du marché de revente de ces articles aboutit à des prix astronomiques pour ce qui n’est que du prêt-à-porter. Supreme rivalise aujourd’hui avec les plus grandes enseignes de luxe sans avoir renoncé à son ADN. Certains y verront un aboutissement, d’autres une forme de cynisme. Supreme est aujourd’hui valorisé à près d’un milliard de dollars et l’engouement autour de cette marque semble se prolonger. L’histoire continue et les paris sont ouverts sur sa capacité à continuer sur cette dynamique. James Jebbia reçoit régulièrement des offres d’achat et la marque doit faire face à une concurrence de plus en plus féroce dans un univers très versatile, soumis par définition aux effets de mode.
L’auteur
Marc Drillech est directeur général de IONIS Education Group. Il est l’auteur de Brand Success Tome 2.
Pour aller plus loin
Comment cultiver l’art de se faire rare
[ad_2]
Vous souhaitez Développer votre stratégie digitale ? Profitez dès maintenant de l’expertise d’un professionnel en postant vos besoins sur Mars87.com
Yalayolo Magazine
Mars87 Innovative Digital And Social Media Marketing