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Placées sous la tutelle du ministère de l’Intérieur, les forces de la Gendarmerie nationale sont des militaires habitués et entraînés à se battre, mais pas seulement. Ses rangs comptent également 60 docteurs, plus de 300 ingénieurs, 53 masters recherches et 71 DEA scientifiques. Cette richesse, “unique au sein du ministère de l’Intérieur” selon le site du gouvernement, contribue sans conteste à pousser l’innovation au sein de l’institution. Une démarche que cette dernière entretient en facilitant et en valorisant les initiatives personnelles.
L’intrapreneuriat, dans l’ADN de la Gendarmerie
Pour la Gendarmerie, l’intrapreneuriat est plus qu’un droit, presque un devoir soutenu par le bureau de la qualité et de l’innovation participative ainsi que la cellule d’innovation participative désormais rattachée à l’agence de défense. En 2006, celle-ci lançait ainsi la hotline “Feuille de route” pour permettre à ses agents de faire remonter des problèmes rencontrés sur le terrain. “C’est ce qu’on appelle le caillou dans la chaussure, un frein qui ne nous empêche pas de faire notre travail mais limite notre efficacité” précise alors le général Didier Fortin.
Pour compléter ce premier outil, un peu passif, et transformer le gendarme en « acteur de son métier« , un second dispositif a vu le jour pour valoriser “les bonnes pratiques qui requièrent le développement d’un produit ou d’une solution”, soit des projets mis au point “par des agents sur leur temps de repos, le soir ou le week-end, sans financement particulier” explique le général Didier Fortin. Une fois qu’ils jugent leur modèle assez développé, ils peuvent le partager sur un Wik’innovation et participer aux Ateliers de performance organisés tous les ans, à Paris.
Cet événement, qui existe depuis plus de 15 ans, permet d’examiner les produits imaginés en interne : “Un panel de futurs utilisateurs détermine les plus pertinents du point de vue de leur facilité de mise en oeuvre, de leur pérennité et de leur valeur ajoutée” indique le général Didier Fortin. En 2019, sur les 125 projets proposés, 28 ont été sélectionnés. Depuis le lancement du processus, “1500 bonnes pratiques ont émergé et la moitié sont désormais appliquées par toute la Gendarmerie”.
Des Géo Trouvetou à l’honneur
Au-delà d’une grande liberté et d’un soutien de leurs actions, la Gendarmerie s’avère très reconnaissante envers ces Géo Trouvetou : “Une cérémonie est organisée chaque année dans les locaux de la Direction Générale à Issy-les-Moulineaux pour féliciter les chercheurs qui ont été retenus aux Ateliers de l’Innovation. Ils reçoivent un trophée en présence de leur famille” explique le général Didier Fortin.
Mais le soutien ne s’arrête pas là. Leur implication est également prise en compte dans leur avancement pour leur promotion. Dans le cadre d’une industrialisation, ils peuvent même percevoir des royalties.
Une aide au développement et à l’industrialisation du projet
Certains projets technologiques ou biologiques nécessitent même d’être brevetés. La Gendarmerie accompagne les porteurs de projets dans cette démarche, mais aussi les suivantes : “Nous les aidons à trouver un partenaire qui pourra les aider à industrialiser leur produit et le commercialiser” explique le général Didier Fortin.
Ce fut notamment le cas pour le GendSag, un écouvillon fonctionnant comme un micro-réacteur biologique qui emprisonne les marqueurs ADN d’un échantillon buccale ou des traces de sang et les rend directement analysables. En moins de 2 heures, les résultats sont disponibles contre plusieurs jours habituellement. Le développement à grande échelle de ce produit a été rendu possible grâce à un partenariat avec l’entreprise italienne Copan.
Ce procédé s’avère gagnant-gagnant pour toutes les parties. D’un côté, la Gendarmerie bénéficie d’un produit à un prix plus attractif car produit en série, à grande échelle, de l’autre, les inventeurs perçoivent des royalties sur les ventes réalisées auprès de la Gendarmerie nationale ou d’autres entreprises, ce que le général Didier Fortin qualifie de “juste récompense pour le travail fourni”.
Disrupt 2019 : l’innovation de rupture fait son chemin
Cette vision d’accompagnement a été renforcée pour les projets de rupture dans le cadre du nouveau programme Disrupt, lancé l’an dernier pour “promouvoir des innovations de rupture, d’un point de vue opérationnel comme technologique”.
Parmi les premières solutions soutenues cette année figurent GendScraper (un outil pour débusquer la criminalité sur des sites protégés du net et du darknet et conserver les preuves numériques), Alice (un procédé de recherche assistée d’images), Genbones (un programme d’analyse d’ADN sur ossements) ou encore un procédé d’analyse d’empreinte olfactive. Des thèmes aussi divers que variés qui touchent autant les télécommunications, que l’intelligence artificielle ou le traitement biologique.
Pour transformer ces idées en solutions déployables à grande échelle, la Gendarmerie aide les porteurs de projets à nouer des partenariats avec des universités, des laboratoires de recherches mais aussi à trouver des financements. Certains d’entre eux ont ainsi pu bénéficier d’une subvention du programme européen pour la recherche et le développement, Horizon 2020.
Toujours conserver un temps d’avance
Et parmi tous ces programmes dédiés à l’innovation, de nouveaux émergent pour répondre aux enjeux sociétaux. À commencer par un réel besoin d’anticiper les attaques, en se dotant notamment d’un comité scientifique chargé de faire “une veille sur les nouvelles technologies et d’imaginer comment nos forces pourraient s’en saisir” explique le général Didier Fortin.
En parallèle, la Gendarmerie a élaboré un Agenda quinquennal permettant d’avoir une vue des projets qui arriveront à maturité industrielle à court et moyen termes. Il est ainsi revu chaque année afin de s’adapter au mieux à la société et aux nouveaux enjeux qui touchent la défense. Une “remise en question annuelle” que le général Didier Fortin estime nécessaire pour ne pas se laisser happer par la facilité.
C’est d’ailleurs dans cette même logique d’anticipation que la Gendarmerie prévoit d’accroître ses effectifs dans la cyber-sécurité, d’engager des scientifiques dans ses rangs et de continuer à promouvoir une culture digitale et d’innovation.
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