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Article initialement publié en février 2019
À force de lire des articles écrits ou inspirés par des VCs, on pourrait finir par croire qu’un seul modèle d’entrepreneuriat a de l’intérêt. Ça n’est pas le cas, en tout cas pas pour les entrepreneurs.
Vous avez dit scalable ?
Les logiciels et les marketplaces ont en commun d’être extrêmement scalables, ce qui veut dire qu’une fois le produit construit, le coût marginal (pour satisfaire un client supplémentaire) est négligeable. Il en découle une double complexité :
- financer la fabrication du produit sans qu’il ait d’utilisateur, ce qui crée un fort décalage de trésorerie (dans le meilleur des cas !)
- une fois le produit existant, tout faire pour maximiser le nombre d’utilisateurs et bonifier la profitabilité.
Il s’agit souvent d’un jeu winner takes most/all, car il faut avoir l’échelle de Salesforce pour pouvoir se permettre d’entretenir un produit de la qualité de Salesforce avec la même profitabilité. Sans oublier qu’augmente souvent avec le volume l’utilité fournie au client (on parle alors d’effet de réseau : plus j’ai d’amis sur Facebook, plus Facebook m’est utile).
C’est un jeu dangereux, qui nécessite des financements importants. Un peu comme une fusée qui, tant qu’elle n’est pas sortie de l’atmosphère, doit brûler du carburant massivement, ces entreprises ne peuvent être profitables (et donc arrêter de lever des fonds) qu’une fois une masse critique atteinte. Les fonds de Venture Capital sont pensés spécialement pour y jouer et résister aux inévitables et nombreux échecs (sur un portfolio de 30 entreprises, l’important est d’avoir 1 à 4 grands slams en milliards, et le reste importe peu).
Les VCs ayant un intérêt direct à attirer vers eux les entrepreneurs téméraires (eux n’ont pas un portfolio de 30 sociétés pour diversifier le risque !) qui souhaitent s’y essayer, ils produisent traditionnellement beaucoup de contenu qui met en avant ce type très particulier d’entrepreneuriat. Que les journalistes se ravissent de copier-coller sans mise en perspective.
Une autre voie est possible
L’ennui n’est pas tant que les VCs se fassent les promoteurs de ce modèle mais que personne ne parle des autres. Le résultat pour l’entrepreneur en herbe est le sentiment que seul ce modèle existe, alors qu’il est aux affaires ce que la conquête spatiale est au secteur du transport : des gains potentiels en milliards mais au prix de risques hallucinants, pour des entrepreneurs qui contrairement aux VCs se satisferaient souvent de quelques millions ou dizaines de millions d’euros. Avec significativement moins de risque, et une plus grande liberté d’action que dans le contexte très normé de l’ultra-croissance.
Ok, et du coup je fais quoi ? Du service complexe !
On l’a vu, en raison de leur caractère scalable, le logiciel pur et les marketplaces sont difficiles à faire à petite échelle.
C’est le contraire pour les modèles de services complexes difficiles à automatiser dont la faible scalabilité (coût marginal souvent stable qui rend pertinents les petits acteurs) et la capacité à générer du cash dès le début sont des avantages énormes quand on démarre.
Bien sûr, il est préférable de ne pas se borner à vendre son propre temps, forcément limité. L’idéal est de “faire levier”, ce qui peut se faire de plusieurs façons (cumulables) :
- vendre le temps des autres. C’est le modèle des agences (de chasse de têtes, de développement web, de conseil en transition digitale pour grandes entreprises, de travail temporaire spécialisé ou même des entrepreneurs en bâtiment !). Bien exécutés, ces business ont d’excellents profils risk/reward et atteindre quelques millions de gross margin est à la portée de toutes les têtes bien faites
- faire travailler l’argent des autres. C’est notamment le modèle de l’industrie de l’Asset Management (et des VCs !), un type de services complexes dans lequel il est normal de se rémunérer non pas à l’heure mais sur la base de l’argent gagné grâce à l’argent des clients, en prenant au final peu de risques. Créer un hedge fund n’est probablement pas à la portée de tout un chacun mais une agence immobilière ou un broker d’assurances, oui. Ou en faisant travailler l’argent de la banque via un actif physique comme un espace de coworking, une chaîne d’escape game, de karaoké ou de restaurants italiens !
- amplifier la création de valeur du temps humain par des process fins et du logiciel. L’immense majorité des entreprises de services, même très bien portantes, n’ont pas fait leur transition digitale et fonctionnent toujours comme elles le faisaient il y a 20 ans. Alors qu’un usage habile des technologies existantes en SaaS (coda.io / Airtable, suite Google, CRM moderne, marketing automation…) permet avec des connaissances techniques limitées de faire énormément de choses et de démultiplier la productivité
- bien sûr, tout cela fonctionne d’autant mieux que l’on choisit des marchés en tension et des modèles économiques profitables. Chacun a pu en faire l’expérience en appelant un serrurier à 3 heures du matin, ou en inscrivant son enfant dans une école de commerce privée
Next steps
- La décision de se lancer dans une aventure très risquée avec un gain potentiel en milliards (modulo la dilution suite aux x tours de financements) ou moins risquée avec un gain en millions appartient à chacun. Pour que le choix de la première option soit justifié, il faut souvent avoir une ambition extra-financière, vouloir changer la façon dont une partie du monde fonctionne
- Le fait que ces business aient de très bons ratios risk/reward n’exonère bien sûr pas de tout risque, et encore moins de tout effort. Les entrepreneurs à succès ont en commun de travailler plus qu’ils ne l’auraient pensé possible et de rechercher l’excellence, quel que soit le type d’entreprise
- Il est souvent utile de travailler quelques mois chez un acteur traditionnel pour comprendre les ficelles du métier
- En fonction de sa situation financière personnelle, trouver un ou plusieurs Business Angels du secteur partants pour investir quelques dizaines/centaines de milliers d’euros peut aider
Bonus : Même si les milliards ne sont pas l’objectif il n’est pas impossible, en ajoutant progressivement du logiciel et une approche data, de finir dans une bonne position pour construire une entreprise scalable, comme le démontre ce très bon article de Tomasz Tunguz sur le phénomène naissant des AI-driven agencies.
Retrouvez l’article originellement publié sur le compte LinkedIn de Pierre Entremont. Pierre Entremont est Principal chez Otium – @pentremont
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