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« Tous les fonds ont des investissements avec des performances à différents niveaux », a déclaré cette semaine un porte-parole de SoftBank, alors que la holding japonaise doit dévoiler ses derniers résultats financiers mercredi. Des résultats particulièrement attendus par les analystes après un trimestre chaotique pour WeWork, investissement majeur de SoftBank, qui a dernièrement dû injecter 5 milliards de dollars dans l’entreprise de coworking et lancer une offre publique d’achat sur les titres qu’il ne possède pas encore pour un montant maximum de 3 milliards.
Ils seront d’autant plus scrutés que SoftBank a annoncé cette année son intention de lancer un deuxième fonds d’investissement. Le conglomérat chercherait pour cela à lever des capitaux auprès de banques. Ce nouveau fonds serait constitué de deux unités: l’une à rendement fixe ; l’autre paierait l’investisseur en fonction du bénéfice minimal effectué par le fonds.
« Le Vision Fund [fonds doté d’une enveloppe de 100 milliards de dollars lancé en 2016 par SoftBank en partenariat avec l’Arabie saoudite, NDLR] n’a que deux ans à peine et nous sommes confiants sur le fait que notre portefeuille diversifié de 88 entreprises produira un rendement solide sur le long terme », a ajouté le porte-parole. Si nombre des investissements du Vision Fund, qui mise généralement sur des entreprises déjà bien soutenues en capital-risque, ont bien pris de la valeur (Uber, Flipkart, Guardant Health), d’autres ont échoué et mettent en lumière, tout comme le carnage WeWork, des failles dans la stratégie de SoftBank à investir des sommes colossales dans des startups dans l’espoir de créer les champions du numérique de demain.
Pour rappel, SoftBank a investi:
- 11,8 milliards de dollars dans Didi Chuxing
- 10,7 milliards de dollars dans WeWork
- 7,7 milliards de dollars dans Uber
- 3 milliards de dollars dans Grab
- 3 milliards de dollars dans Coupang
Mise en pause des recrutements et du développement international chez Plenty
En juillet 2017, l’AgTech californienne Plenty a bouclé un tour de table de 200 millions de dollars mené par SoftBank (avec les participations du CEO d’Amazon Jeff Bezos et de l’ancien chairman d’Alphabet Eric Schmidt). Il s’agissait d’une somme plus élevée que les 100 millions de dollars que cherchait initialement à réunir Plenty. L’objectif était alors d’accélérer de manière significative le développement de la startup.
L’industrie des fermes verticales valait alors 2 milliards de dollars, selon Global Market Insights. Elle avait notamment mené au développement de techniques telles que l’aéroponie (culture hors-sol) et l’hydroponie (culture de végétaux dans l’eau), prometteuses dans un monde de plus en plus peuplé et de plus en plus compliqué à nourrir. D’autant que d’autres entreprises se lançaient au même moment dans les fermes verticales: Bowery (95 millions de dollars levés en 2018 auprès de Google Ventures et Temasek) ou encore 80 Acres Farms (40 millions de dollars levés en janvier 2019 auprès de Virgo Investment Group).
Après l’investissement de SoftBank et l’instauration de nouveaux objectifs, la direction de Plenty n’est pas parvenue à faire croître la startup aussi rapidement que ce que souhaitait la holding japonaise, selon le Wall Street Journal. En 2018, la direction de Plenty aurait ainsi décidé de mettre en pause les recrutements, de se concentrer sur le développement de sa technologie et de se limiter pour l’instant au marché américain.
Des objectifs non atteints et des ventes au ralenti chez Wag
Début janvier 2018, SoftBank a mené un tour de table de 300 millions de dollars dans Wag (qui n’en cherchait initialement que 75 millions), plateforme américaine qui propose de balader ou de garder les chiens de propriétaires pendant leur absence. A l’issue de ce tour de table, SoftBank détenait 45% du capital de l’entreprise californienne. Le financement devait permettre à Wag de développer son offre, de s’étendre sur le territoire américain, voire à l’international, sous l’impulsion de SoftBank, et de prendre le dessus sur le rival Rover.
Le marché des services aux animaux domestiques se trouvait alors en plein essor. Selon l’American Pet Products Association, les dépenses autour des animaux domestiques augmentaient chaque année depuis 1994 et avaient atteint près de 67 milliards de dollars aux États-Unis en 2016. Preuve de la bonne forme du secteur, PetSmart avait racheté l’année précédente Chewy, une marketplace américaine spécialisée dans la vente de produits pour chiens et chats, pour un montant record de 3 milliards de dollars. D’autres acteurs s’étaient positionnés sur ce marché, à l’image de Rover, qui permet de trouver un logement temporaire pour les animaux domestiques. La startup avait levé 65 millions de dollars l’année précédente.
Mais selon plusieurs médias américains, Hilary Schneider, ex-CEO de LifeLock qui a remplacé Joshua Viner, cofondateur de l’entreprise, à la tête de Wag à l’occasion de la levée, n’est pas parvenue à atteindre ces objectifs. Les ventes n’ont pas connu la croissance espérée et ont même ralenti. Pendant ce temps-là, Rover a vu ses ventes croître plus largement. La faute aux équipes dirigeantes recrutées lors de la méga-levée de 300 millions de dollars? Aujourd’hui, Wag chercherait aujourd’hui à se faire racheter, notamment auprès du géant des animaux domestiques Petco, pour un prix inférieur à sa valorisation lorsque SoftBank a fait son entrée au capital.
Le bailleur automobile Fair perd de l’argent sur chaque location
Fin 2018, SoftBank a mené une levée de 385 millions de dollars dans le bailleur automobile californien Fair, valorisé alors à plus d’un milliard de dollars. Fair propose des offres de location flexibles aux particuliers mais aussi aux personnes qui utilisent une voiture de manière professionnelle tels que les chauffeurs de VTC. Fair s’était ainsi allié à Uber, autre investissement de SoftBank, pour équiper ses chauffeurs contractuels de véhicules. Dans ce cadre, la startup avait racheté Xchange Leasing, la filiale de location du géant du VTC.
Fair et SoftBank avaient alors pour ambition de multiplier par dix l’activité de la startup aux États-Unis et de permettre à Uber de « recruter » plus de chauffeurs. La holding japonaise avait déjà investi massivement dans d’autres acteurs du ride-sharing: Didi Chuxing, Grab, Ola, Getaround… L’idée était alors aussi d’utiliser Fair pour développer toutes ces activités au niveau mondial.
Mais selon d’anciens employés cités par le Wall Street Journal, Fair a dépensé la majeure partie de ces 385 millions de dollars en moins d’un an. Le financement a servi à développer le parc automobile, à recruter des profils commerciaux et à multiplier les offres de promotion. Résultat: la startup perdait de l’argent sur chaque location. Elle faisait face à différents problèmes, tels que la dépréciation de la valeur des véhicules loués, vendus alors à perte lors d’enchères, des voitures expédiées aux mauvais parcs, des vols…
Fin octobre, le fondateur de l’entreprise Scott Painter a fini par démissionner de ses fonctions de CEO, une semaine après le licenciement de presque 40% des effectifs et l’annonce d’un plan de restructuration. Il a été remplacé par Adam Hieber, de SoftBank, jusqu’à la nomination d’un nouveau CEO. Peu avant, Scott Painter aurait cherché à lancer un nouveau tour de table. En septembre, la startup a signé un prêt de 500 millions de dollars auprès d’un groupe de créanciers, dont SoftBank et Mizuho Corporate Bank, dans le but notamment de renforcer son alliance avec Uber. Le même mois, Fair rachetait le service d’abonnement de Ford, Canva. Mais au cours du dernier mois, SoftBank aurait demandé à ce que Fair réduise ses coûts d’opération. Récemment, Fair s’est mis à demander des acomptes beaucoup plus élevés que précédemment pour son offre de location au mois.
Comme pour Plenty, Fair souhaiterait désormais se concentrer sur le développement de sa technologie tout en continuant à réduire les coûts d’opération.
Des pertes chez Didi Chuxing et Coupang
En Asie aussi, des entreprises dans lesquelles SoftBank a investi des milliards de dollars se trouvent encore loin de la rentabilité. C’est notamment le cas du Chinois Didi Chuxing et du Sud-Coréen Coupang, deux entreprises, qui, si elles restent loin de la faillite, évoluent dans des secteurs gourmands en cash: les VTC et l’e-commerce.
Au début de l’année, Didi Chuxing, l’investissement le plus important de SoftBank, licenciait 15% de son personnel, soit près de 2 000 personnes. La licorne devait réduire ses « activités non essentielles » et augmenter ses investissements dans des domaines clés comme les technologies de sécurité, l’ingénierie des produits ou encore les opérations internationales. L’entreprise prévoyait toutefois 2 500 recrutements dans le même temps pour travailler sur ces domaines clés. L’entreprise s’était notamment vue imposer des règles plus strictes concernant les chauffeurs qu’elle emploie, rendant leur recrutement plus difficile, à la suite de deux meurtres de passagers.
En 2018, Didi Chuxing a perdu 1,6 milliard de dollars et dépensé près d’1,7 milliard de dollars au cours des six premiers mois de cette même année en subventions pour les conducteurs et opérations promotionnelles pour les passagers dans un contexte de forte concurrence. En mai dernier, toutefois, Toyota est venu investir 550 millions de dollars dans l’entreprise en proie à des difficultés financières dans un contexte marqué par la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis. Pendant l’été, Didi Chuxing, qui perdrait de l’argent sur chaque réservation, aurait entamé la recherche d’un nouveau financement.
Enfin, Coupang, dans lequel SoftBank a investi 3 milliards de dollars, dont 2 milliards il y a moins d’un an qui lui permettaient au passage d’atteindre une valorisation de 9 milliards de dollars, aurait enregistré au cours des douze derniers mois plus de pertes que de revenus. Fondée en 2010 par Bom Kim, Coupang reste toutefois l’une des principales plateformes e-commerce en Corée du Sud.
En un peu plus de deux ans, le fonds Vision Fund a brûlé la majeure partie de son capital de 100 milliards de dollars dans des entreprises déficitaires au modèle économique instable (71,4 milliards de dollars dans 83 entreprises, au total, pour 20,2 milliards de dollars de gains et 6,4 milliards de dollars distribués aux investisseurs au mois de juin 2019). L’entrée en Bourse ratée de WeWork reste aujourd’hui l’échec le plus retentissant de SoftBank. Mais la valorisation en chute libre d’Uber, entré en Bourse avant la tentative de WeWork, et les échecs de Plenty, Wag ou Fair, pourraient venir réduire les chances de la holding de lever un deuxième méga-fonds d’investissement.
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Yalayolo Magazine