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L’extrême complexité de prendre des décisions au sein de nos sociétés contemporaines peut s’illustrer avec le Brexit qui jette depuis plus de trois ans le Royaune-Uni dans une crise démocratique sans précédent.
Cette complexité est d’autant plus prégnante qu’elle s’inscrit dans un réel profondément marqué par des exigences de transparence et de redevabilité. Elle emporte une myriade de conséquences, à l’échelle individuelle et collective, à l’échelle organisationnelle quelle que soit la taille de l’organisation.
Le passage difficile du doute à la décision, qui distingue le temps contemplatif du temps de l’action, matérialise cette complexité. Elle se prolonge par l’émergence inéluctable de conflits entre intérêts nécessairement divergents, voire antagonistes, conflits qui ont vocation à se cristalliser dans le processus de construction de la décision. Processus qui traverse toutes les disciplines et tous les espaces, qu’ils soient publics ou privés, la décision subit de plein fouet la complexité multiple de nos sociétés contemporaines.
Le défi de la décision complexe peut dès lors être énoncé dans les termes suivants :
Comment le processus décisionnel est-il en mesure d’intégrer tous les éléments pertinents à la décision, éléments dont on sait qu’ils sont ou seront nécessairement en opposition ?
Comment s’assurer de la pertinence de la décision et de son acceptabilité, conditions essentielles à l’ère de la redevabilité et de la transparence ?
Pour répondre à ces questions cardinales, force est d’admettre les limites des modèles modernes de prise de décision. Fondés sur la seule rationalité suite à l’héritage de Descartes aux dépens de la pensée holistique de Pascal, non seulement ils ne permettent pas l’intégration des intérêts en présence et des zones d’incertitude, mais ils s’affranchissent de l’individu, de son libre arbitre et de sa faculté à exercer un jugement ouvert.
Il semble pourtant évident que l’humain, dans l’exercice de prise de décision, ne peut plus cantonner son intervention au seul domaine normatif, espace destiné à devenir inéluctablement le domaine réservé de l’intelligence artificielle. De fait, ce nouveau paradigme place l’humain au cœur des organisations et des organes de pouvoir, signant une revanche des compétences cognitives sur les compétences purement normatives. Savoir décider, trancher, affronter, défier exige des compétences, non plus purement normatives, ce que l’on a longtemps pensé, mais cognitives et empiriques. Certains en appellent à l’intuition : l’intelligence de l’émotionnel. Cependant, elle constitue une prise de conscience immédiate et individuelle et peut conduire à des erreurs d’appréciation. Nous préférons la notion de discernement, comprise comme la faculté de reconnaître distinctement en faisant un effort des sens, de l’esprit de la psychologie.
Le discernement, qu’il soit politique, économique, scientifique, stratégique, voire militaire, s’illustre le plus souvent par ses absences ou ses errances. Ainsi, en mettant aux voix la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne par voie de referendum le 23 juin 2016, le Premier Ministre David Cameron a manqué cruellement de discernement politique, et il n’est pas certain que le Royaume-Uni se relève pleinement de cette erreur historique.
Une autre illustration d’un défaut de discernement, cette fois économique, est la cession par Arnaud Lagardère de sa participation de 7,4% au capital de EADS, devenu Airbus, il y a six ans pour un montant de 2,283 milliards. Le bloc vaudrait à ce jour près de 7 milliards. Le manque de discernement peut être collectif.
Ces exemples illustrent une réalité désormais inéluctable, celle de l’impérieuse exigence de discernement dans les instances de pouvoir, qu’elles soient publiques ou privées. De sorte que le discernement s’accompagne de l’émergence d’une nouvelle forme de leadership, où la vision l’emporte sur le management, la faculté de convaincre sur celle d’imposer.
A cet égard, la question du discernement revêt une importance toute particulière dans l’entreprise, et notamment, au sein du conseil d’administration. Organe collégial, le conseil d’administration décide, notamment en déterminant la stratégie, en nommant les instances exécutives et en les révoquant le cas échéant. Longtemps enclavé et préservé des regards indiscrets, il est désormais sous haute surveillance et engagé dans un processus de redevabilité qui peut frapper potentiellement toutes ses décisions. Dès lors, et plus que jamais, on attend des administrateurs qu’ils exercent leur mission avec discernement individuel et collégial. Or, le discernement exige un apprentissage, qui consiste notamment à aiguiser les facultés d’appréciation afin de« juger clairement et sainement les choses », selon la définition du Petit Robert.
A l’ère de la complexité, de l’hyper transparence et de l’intelligence artificielle, la question n’est plus tant celle des ressorts profonds de la décision que celle des qualités requises tant normatives, cognitives qu’empiriques. En plaçant l’humain au cœur de la décision, le discernement a de beaux jours devant lui.
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