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Il y a quelques jours, Tim Cook présentait, Apple News, la nouvelle application d’Apple proposant une sélection de magazines et de journaux accessibles par abonnement. Arguant de sa capacité à toucher des millions de lecteurs potentiels sur le milliard d’appareils en circulation dans le monde, Apple compterait ainsi prélever la moitié des revenus de l’abonnement proposé. Si ce pacte faustien concerne pour le moment les titres de presse américains, il serait judicieux que les rédactions françaises s’intéressent de près aux dynamiques à l’œuvre dans le pays; les évolutions du marché américain étant souvent le prélude aux transformations des autres marchés occidentaux.
Apple s’engouffre dans la brèche
Les premiers mois de l’année furent particulièrement difficiles pour les médias américains. Entre BuzzFeed, AOL, Yahoo, Vice et le Huffington Post, ce sont près de 2 000 postes qui furent supprimés dans ces rédactions en l’espace de quelques semaines. Un climat quasi-apocalyptique, parfaitement retranscrit par le tweet du journaliste Chris Hayes : “Et s’il n’y avait littéralement aucun modèle rentable pour l’information en ligne ? “.
Une interrogation un brin défaitiste car il existe pourtant bien un modèle viable : celui de la consommation par abonnement. Cependant nombre de médias peinent à l’identifier, prisonniers d’une approche court-termiste, où la priorité est souvent donnée à la publication d’articles générant du clic pour espérer récupérer une fraction de la manne publicitaire.
C’est précisément dans cette brèche que Tim Cook s’est engouffré avec Apple News en prenant le pari d’abonner les lecteurs à leurs quotidiens et magazines favoris sans passer par les sites dédiés. Toutefois, en dépit de la puissance de feu d’Apple, la messe est loin d’être dite. Intrinsèquement, la presse dispose des fondamentaux nécessaires pour systématiser la consommation par abonnement : une audience, un produit sans cesse renouvelé et un basculement vers le numérique.
Le New-York Times et le New-Yorker montrent la voie
Si c’est outre-Atlantique que se trouvent (pour le moment) les proies d’Apple, c’est aussi là-bas qu’existent les plus fortes résistances à cette prédation. Une opposition menée par des médias forts de leur poids symbolique et économique. Deux noms s’imposent immédiatement: The New Yorker et le New-York Times.
L’an dernier, le premier a généré environ 115 millions de dollars en revenus d’abonnement grâce à son paywall. Quant au second, en plus d’incarner l’avant-garde grâce à un travail de fond sur l’originalité des contenus, la diversité des formats et un ton moins conventionnel, il mène la fronde anti Apple News. Dès la fin de la conférence de présentation d’Apple, Mark Thompson, le directeur général du New-York Times sonnait le tocsin : “nous nous méfions de cette idée consistant à habituer les gens à trouver nos contenus ailleurs que chez nous. Nous craignons aussi que notre journalisme puisse être brouillé et mélangé avec celui des autres dans un mixeur géant type Magimix”.
Plus que les autres, ces médias ont compris que la martingale ne résidait ni dans la poursuite de Facebook ni dans les artcles aux titres aguicheurs mais plutôt dans la création de contenus à haute valeur ajoutée pour lesquels les lecteurs sont prêts à payer régulièrement.
D’ailleurs, selon le Reuters Institute Digital News Report, les Américains qui paient déjà pour des services de médias en continu sont cinq fois plus susceptibles de payer pour des actualités en ligne. Un fait qui épouse l’analyse de David Simon, ancien reporter du Baltimore Daily et créateur de The Wire : “Si vous n’avez pas un produit pour lequel les gens sont prêts à payer, vous n’avez pas de produit. La lutte pour revenir à une source de revenus en ligne cohérente est la seule qui compte pour le journalisme. Et ça veut dire s’accrocher au personnel expérimenté et vendre du steak tous les jours, pas grésiller.”
Grâce à la consommation par abonnement, et tout en respectant les nouvelles réglementations relatives à la protection des données personnelles, les éditeurs peuvent fournir aux annonceurs des informations précises afin d’améliorer la pertinence de leur ciblage publicitaire… Et prétendre à une plus grosse part du gâteau de la publicité en ligne ! C’est notamment le cas du Financial Times qui a augmenté de 20% à 50% la facture de la publicité à destination de ses lecteurs premium depuis la mise en place de son paywall.
A l’évidence, contrairement à ce qu’ont longtemps affirmé certains investisseurs en capital-risque, qui financent massivement les nouveaux médias tels que BuzzFeed et Vice, il est encore tôt pour sonner l’hallali sur la presse traditionnelle… à condition qu’elle opère les bons choix stratégiques dès à présent.
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Yalayolo Magazine