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Comme s’ils s’étaient passé le mot, les chanteurs français changent de nom de scène les uns à la suite des autres. En quelques mois, Christine and the Queens est devenue Chris, Maître Gims se passe du Maître, et Béatrice Martin annonce vouloir abandonner son Cœur de Pirate.
Car le nom de scène évoque un univers visuel, une expérience sonore, des mots et un sens qui forment la singularité de l’artiste, il est souvent considéré comme une marque. Nombreux sont ceux qui font le choix de le déposer sur l’INPI, l’Institut National de Propriété Industrielle (Aznavour, Céline Dion, Kaaris, Black M, etc).
L’ambiguïté entre l’identité du créateur et celle de la personne se traduit juridiquement par un lien ténu entre le droit privé et le droit des marques. L’exemple de Patrick Maurice Benguigui, qui a déposé sa marque Patrick Bruel et devient pour l’état civil Patrick Bruel Benguigui en 2003, illustre bien la complexité de cette question.
La tendance du changement de nom se veut minimaliste. Elle est initiée en septembre 2018, quand Héloïse Letissier choisit de se faire appeler « Chris », pour la sortie de son dernier album. Avec Christine and the Queens, elle pensait déjà le thème de la transidentité et parlait de sa rencontre avec une drag queen anglaise, la source d’inspiration de ses créations, mais avec cette conjonction de coordination « and », elle s’en distinguait aussi. La métamorphose de Christine and the Queens en Chris, un prénom mixte, symbolise une évolution artistique qui adopte et fusionne avec une identité transgenre.
Un nom de scène peut être difficile à porter au quotidien car il joue un rôle dans la grande majorité des interactions sociales. Gandhi Djuna, alias Maître Gims, explique son changement de nom par le malaise qu’il vit au quotidien de se faire appeler « Maître » à la moindre rencontre. Depuis ses débuts, l’artiste a évolué et cette marque, inspirée d’un manga de sa jeunesse, ne correspond plus à l’univers qu’il souhaite déployer aujourd’hui. Quatre lettres suffisent désormais pour désigner l’artiste.
La locution oxymorique Cœur de Pirate, qui mêle la douceur du cœur à la brutalité du pirate pour décrire l’image artistique de Béatrice Martin, ne reflète plus, en tout cas de moins en moins, la performance de l’artiste, comme elle l’écrit sur son poste Instagram. Consciemment ou non, les artistes ont intégré les principes du marketing stratégique, soutiennent la cohérence du message entre leur propre image et leur création.
Dans cette volonté d’unifier cette communication, le titre de l’album se veut souvent éponyme, c’est-à-dire qu’il prend le nom de son créateur (Cœur de Pirate, Zaz, Kendji, Vianney, Renaud, Louane, Chris, Claudio Capéo, etc), pour impacter, signifier que l’intégralité de leur être est contenue dans cette pochette rectangulaire. Il s’avère pourtant que les années passent et qu’ils continuent d’avoir à dire, à chanter, et ils tentent ensuite de détacher ce qu’ils sont, du message auquel ils croyaient les décennies passées.
La musique a toujours été commercialisée, souvent aux dépens de l’artiste, mais aujourd’hui, ils ont assimilés les codes du marché, comme l’illustre cette tendance du changement de nom dans la sphère musicale.
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Yalayolo Magazine