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Inimaginable et imprévisible, le Covid-19 a tout chamboulé en mars dernier, obligeant les Français·es à se confiner et de nombreux magasins à baisser le rideau pour une durée indéterminée. Ces deux mois ont modifié notre rapport aux autres, au temps et à l’économie. En accélérant une prise de conscience entamée depuis quelques années, le coronavirus rebat les cartes du commerce. Plus vertueux, plus responsable, plus engagé mais procurant toujours autant de plaisir, le retail doit entamer sa mue sous peine d’être boudé par les consommateur·ice·s.
Loin de se laisser abattre, de nombreuses sociétés ont choisi de se retrousser les manches, notamment dans la filière textile où des entreprises comme 1083, spécialisée dans la confection de jeans et de baskets made in France, ont arrêté leur production du jour au lendemain pour fabriquer des masques. Ce réflexe de solidarité témoigne du nouveau sens que devra prendre le commerce.
Réinventer la notion de plaisir et revenir à l’essentiel
Pour dépasser le problème de la surconsommation que connaît notre société, doit-on passer du plaisir à la raison pour se contenter de l’essentiel ? « Nous ne sommes pas binaires, nos choix sont teintés d’éléments rationnels, irrationnels et d’émotionnel. On ne peut pas remplacer le plaisir par la raison » , analyse Thomas Huriez, co-fondateur et PDG de 1083. Aujourd’hui, l’urgence est de remplacer les plaisirs creux et frénétiques de la consommation de masse par les plaisirs plus profonds, plus riches de la consommation plus durable » . Ce vœu prendra assurément du temps pour s’imposer et c’est aux marques et aux entreprises qu’incombe la lourde tâche de convaincre leurs client·e·s.
Pour sensibiliser, Thomas Huriez organise des visites de ses usines. Faire comprendre aux consommateurs qu’un « jean ne pousse pas sur un arbre » , que sa confection prend du temps, qu’il y a des emplois derrière, permet de transformer un achat en une expérience unique et marquante. « Plus on partage, plus les consommateurs sont curieux, c’est hyper engageant » . L’entrepreneur a également édité un livre, l’Atelier du jean (aux Editions Eyrolles), permettant de fabriquer soi-même ses propres modèles. Ce qui est une manière de remettre au centre du retail, « le commerce dit essentiel, non pas au sens de produits de base et de premières nécessités, mais d’humain et de choses importantes » , ajoute le PDG de 1083.
Le Covid a également souligné l’attachement des Français·es aux petits commerçants locaux et au Made in France, filières qu’ils ont soutenu par des dons et des pré-commandes. Les chiffres le confirment, 77% des Prosumers (individus pro-actifs qui influencent le reste de la population) envisagent de consommer localement à l’avenir même si les prix sont plus élevés, selon l’étude réalisée par BETC Fullsix(Havas).
Physique et digital se côtoient pour renforcer les entreprises
Le Covid-19 a mis en exergue un autre écueil, celui du manque de présence numérique des petits commerces. Du jour au lendemain, certains d’entre eux se sont retrouvés sans aucune source de revenus par manque d’un canal numérique pour poursuivre leur activité. Le gouvernement en a lui-même pris la mesure, annonçant une aide de 500 euros pour pallier ce manque. Le confinement est venu renforcer un phénomène en pleine croissance. Les ventes via internet sont passées de 57 milliards en 2014 à 115 milliards prévus en 2020, selon les chiffres de la Fevad, et ont connu une croissance de 24% au premier trimestre 2020. Ceci dit, l’avènement de l’e-commerce ne signe pas la fin du commerce physique qui possède de multiples atouts (pouvoir essayer, toucher, être conseillé). La tendance à l’omnicanalité, où physique et numérique se complètent, se confirme également avec le click and collect qui conjugue parfaitement ces deux dimensions.
« Se diversifier, et ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier » , résume Thomas Huriez dont l’entreprise est passée d’une centaine de jeans vendus en 2013 à 50 000 aujourd’hui. Sa société a pu continuer à vendre ses produits durant le confinement grâce à son site. Mais « le jour où les pure players du e-commerce vivront un bug majeur avec un virus qui bloque tout, les magasins en centre ville seront contents d’avoir un site physique » . Pour créer des organisations robustes, il est donc primordial de diversifier ses sources (fournisseurs) et ses canaux de distribution.
Un engagement de tous les acteurs
Si les signaux convergent vers un commerce plus responsable, le changement ne s’opérera pas du jour au lendemain surtout pour les sociétés qui « fonctionnent depuis 50 ans avec leurs charges fixes, leurs processus, leurs fournisseurs. Cela rend leur paquebot beaucoup plus lent à tourner » , admet Thomas Huriez. Il n’empêche que toutes les entreprises qui résisteront avant d’amorcer ces changements risquent d’être mises sur la touche. Et ce constat ne s’adresse pas uniquement aux entrepreneurs mais aussi aux fournisseurs, aux logisticiens et aux acteurs du paiement. « La partie paiement va connaître sa révolution de sens, les acteurs du secteur vont devoir montrer leur engagement structurel. Sur ce sujet PayPal Business – avec lequel travaille la startup – peut être un des acteurs majeurs du paiement responsable. Ceux qui le feront développeront des opportunités, c’est certain” , est convaincu Thomas Huriez. Et d’ajouter : » Nous avons aussi choisi PayPal car ce dernier représente un tiers de confiance, de transparence pour les achats en lignes » .
Le secteur de la logistique est aussi en pleine mutation. « Il y aura toujours des livraisons d’urgence mais c’est aussi au logisticien de montrer les vertus d’une livraison moins frénétique » . En ce sens, les consommateur·rice·s devront envisager une nouvelle notion du temps où l’immédiateté ne sera plus reine. Ce qui permettra de mutualiser des colis et promouvoir la création à la demande, sans stock. Cette notion est très importante car, « dans l’achat, une partie du plaisir, c’est le désir et le désir, c’est attendre » , conclut Thomas Huriez.
Le futur du commerce tentera de rééquilibrer les abus actuels et de redonner du sens à nos achats en les repensant à la bonne échelle : locale pour la nourriture, nationale ou européenne pour les vêtements ou encore internationale pour la recherche. L’enjeu est de réussir à créer « une démarche de collaboration du recyclage du coton aux consommateurs pour des développer des relations plus pérennes ».
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