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La jeune patronne de la marque mythique de cigares Los Reyes incarne une nouvelle génération de producteurs dominicains définitivement décomplexée vis-à-vis de leurs voisins cubains.
L’événement a lieu au mois de février, pendant le carnaval. Les passionnés de cigares ne le rateraient pour rien au monde. Chaque année, près de 500 Américains, Brésiliens, Allemands et autres Australiens, tous amateurs de belles volutes, débarquent à Saint-Domingue, en République dominicaine, pour assister au festival Procigar. C’est l’un des trois plus grands événements au monde consacrés aux cigares. L’occasion de partager leur passion avec les meilleurs spécialistes dominicains. Car pendant toute une semaine, les festivaliers sont reçus directement chez les producteurs du pays pour des visites privées des châteaux, des propriétés, des champs de tabac ou des manufactures. C’est aussi l’occasion de dégustations. Arturo Fuentes, Davidoff, Montecristo, la Flor Dominicana, Quesada, La Aurora, General Cigar Dominicana ou encore Los Reyes, tous les grands noms du cigare se prêtent à l’exercice de bonne grâce.
Il faut dire que le festival Procigar est leur création. Un événement conçu comme un jubilé pour un pays qui affiche désormais le titre de « champion du monde du cigare ». Car si Cuba et ses havanes cultive depuis longtemps son statut de paradis du cigare, c’est bien la « RepDom » qui domine désormais le marché, de la tête et des épaules. Le pays est devenu en quelques années la plaque tournante du cigare premium, ceux entièrement fabriqués à la main, avec une production d’environ 250 millions d’unités. Soit environ la moitié du marché mondial, et trois fois plus que Cuba.
Des procès interminables avec Cuba
La production dans l’ancienne Hispaniola est contrôlée par une poignée de familles qui ont fui Cuba et les nationalisations de Fidel Castro, dans les années soixante, en emportant avec eux leurs semences, leurs savoir-faire et leurs marques. Face aux havanes, 100 % cubains, ils développent des assemblages plus souples et plus aromatiques en jonglant avec les meilleures productions locales, mais aussi
celles des pays voisins comme le Nicaragua. Comme les Cifuentes à l’origine de la marque mythique Partagas ou les Quesada. Les réfugiés redevenus propriétaires terriens et producteurs emploient désormais des dizaines de milliers de personnes dans le pays. Beaucoup de ces familles cubaines ont choisi de revendre les droits de leurs marques à des groupes internationaux, au prix de procès interminables avec Cuba. C’est ainsi que le groupe britannique Imperial Brands a racheté 50 % de Habanos S.A., ce qui lui a permis de mettre la main sur des marques d’origine cubaine comme Romeo y Julieta, H. Upmann et Montecristo, même s’il ne peut les vendre qu’aux États-Unis, en raison de l’embargo sur Cuba, ou les consommer sur place. Une chance pour les fans de ces marques et pour les touristes, toujours plus nombreux, à visiter les grandes manufactures. « Plus de 2,5 millions de touristes par an visitent une fabrique de tabac à l’occasion d’un séjour balnéaire », explique Mercedes Castillo, la directrice de l’office du tourisme de la République dominicaine en France. D’ailleurs, pendant le festival Procigar, les producteurs honorent chaque soir leurs invités de cigares uniques fabriqués pour l’occasion.
Une stratégie audacieuse basée sur la qualité
Mais le clou du festival reste la soirée de gala ou chacune des douze grandes familles du cigare rivalise d’ingéniosité et de générosité pour doter une vente aux enchères à visée caritative d’objets rares, symboles de leurs savoir-faire et de leur puissance. Des humidificateurs en marqueterie fine, des boîtes collector exceptionnelles, etc. Les prix atteignent des sommets, comme ce coffret-bar offert par la manufacture de Los Reyes, vendu plus de 50 000 dollars américains.
Dans ce concours d’egos, certains voient un thermomètre des rapports de force des membres du « cartel » du cigare. Et cette année, tous les observateurs ont constaté la même chose : l’incroyable ascension de Nirka Reyes. Il faut dire qu’à à peine 30 ans, la jolie célibataire fait figure d’ovni dans un monde d’hommes. Il suffit de l’observer dans ses champs et son atelier situé au milieu de la ville de Navarrete (à 40 km de Santiago de Los Cabaleros, la capitale du cigare dans le pays). La jeune femme incarne une sixième génération de Los Reyes bien décidée à secouer le monde du cigare et elle le fait savoir.
« Notre famille, d’origine espagnole, est dans le tabac depuis 150 ans », explique-t-elle. À peine sortie d’une prestigieuse école en Suisse, elle décide d’apprendre le métier au sein de l’entreprise familiale. D’abord aux ressources humaines, puis aux finances et aux inventaires. Plutôt douée, en quelques mois, elle maîtrise toutes les phases de la chaîne de production. Pas suffisant pour son père qui lui demande de devenir avant tout une experte du cigare. « J’ai appris à rechercher les différences de papier d’emballage et de liant et à les garder humides. J’ai également appris à sécher les tabacs avant la production, à travailler sur les saveurs », ajoute-t-elle.
Des problèmes de santé et l’envie d’aller voir ailleurs l’éloignent du groupe quelque temps. Mais très vite, son père lui demande de venir le seconder. En 2012, elle revient chez Los Reyes en tant que directeur d’usine avec son père. Mais très vite, elle passe de l’observation à la pratique. Elle se lance dans la création de nouvelles marques, renégocie la majorité des achats de tabac et met en place une stratégie audacieuse visant à limiter la production afin de se concentrer sur l’image de marque et la qualité. Son idée est de diviser le volume de cigares produits (13 millions à l’époque) par dix. Le groupe produit actuellement 2,2 millions de pièces, 30 % pour ses marques et le reste en marque blanche. Elle revoit complètement sa façon de fabriquer en mettant l’accent sur la qualité et en motivant différemment les ouvriers.
Si le père continue à surveiller d’un œil l’entreprise, Nirka a les coudées franches pour lancer des projets innovants. C’est ainsi qu’elle a créé sa marque porte-drapeau, Saga. Elle a aussi ouvert un restaurant éponyme, ou se presse la jeunesse branchée de la ville. Au niveau du packaging, elle dénote en vendant ces tubes dans une boîte en forme de livre collector, qu’elle décline en plusieurs volumes. « Chacun de nos cigares raconte une histoire. Et cette histoire se construit dans le temps», dit-elle simplement. Pour beaucoup d’observateurs, Nirka a tout compris de la tendance actuelle. Produire moins, mieux et surtout raconter des histoires, offrir une expérience aux amateurs de cigares, devenus des produits de luxe, consommés dans le monde entier. Celle qui avoue avoir plus souffert de sa jeunesse que de sa féminité incarne mieux que personne une nouvelle génération de producteurs dominicains définitivement décomplexée vis-à- vis de leurs voisins cubains.
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