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Une ouverture du capital est toujours une transaction complexe à laquelle vous n’êtes jamais totalement préparé·e. Il y a pas mal de choses que vous devriez savoir avant de décider de vendre votre entreprise, des choses que vous n’apprendrez que lorsque vous y serez confronté·e. C’est le meilleur apprentissage qui soit : celui acquis par l’expérience.
Le moment opportun pour vendre
À la base, il y a quatre raisons pour vendre tout ou partie de votre TPME :
Globalement, la décision de céder le capital se base sur une combinaison de ces raisons.
Avant de prendre la décision de vendre
Il y a deux choses à faire avant de vous décider à céder votre capital. D’abord, considérez votre position de négociation, de la plus forte à la plus faible. Idéalement, vous devriez déjà avoir au moins une offre sur votre bureau, ou avoir rejeté récemment une ou plus autre offre d’investissement reçue. C’est là la position forte, étant donné qu’une offre attire habituellement d’autres offres.
Si on ne vous a pas fait une offre explicite, vous devriez au moins étudier une ou plusieurs offres implicites. Ces allusions ou indications proviennent généralement de partenaires : clients, fournisseurs, compétiteurs et même d’investisseurs et de conseillers ayant des connections auprès d’autres investisseurs et auprès d’acteurs du private equity.
Si vous n’avez rien de tout cela, céder votre capital va être bien plus difficile, mais pas pour autant impossible. Dans ce cas, il va vous falloir envisager la vente pure et dure. Si vous n’avez reçu aucune offre d’investissement ou d’achat, vous devez établir des connections, construire des relations ciblées, rassembler les éléments d’un pitch deck, rédiger un argumentaire spécifique, prendre votre bâton de pèlerin et commencer à faire du porte-à-porte auprès des acheteurs visés. Si vous n’êtes ni préparé ni patient, vous finirez par lâcher à des tiers beaucoup trop de valeur.
Considérez aussi l’éventualité de vous attacher les services d’un « fixer », un·e CEO extérieur·e expérimenté·e qui prendra les rênes en échange d’une bonne participation au capital et qui sera en mesure de booster votre entreprise et de la mettre en meilleure position de négociation pour céder son capital.
La seconde chose que vous devrez faire avant de prendre votre décision de vendre est d’en parler à tous vos cofondateurs et autres investisseurs historiques ainsi qu’à vos conseillers et à vos employés clés. Tout le monde doit se sentir concerné et intéressé, et des attentes réalistes doivent être exprimées et acceptées par toutes les parties concernées au sein de l’entreprise.
Prouvez la légitimité d’une cession et son prix
De manière très basique, il y a trois façons de calculer le prix de vente de votre entreprise.
Il y a deux choses que vous devrez faire pour vendre votre TPME : montrez que vous valez le prix demandé et prouvez la légitimité de votre opération de cession du capital.
Pour montrer votre valeur, si votre entreprise réalise déjà un chiffre d’affaires d’1 million d’euros et que vous la valorisez à 10X celui-ci, c’est-à-dire à 10 millions d’euros, vous devez être en mesure de montrer à l’acquéreur le chemin qui multipliera sa mise par dix endéans les 3 à 5 ans. Au plus vous vous montrerez objectif pour promettre ce rendement, au plus vous aurez de chances de recevoir le prix demandé pour vos actions.
Il existe plusieurs manières de s’y prendre, mais les tableaux, graphes, schémas, PowerPoint n’y suffiront probablement pas pour qu’on vous signe un chèque. Vous devrez probablement recourir à des éléments de conviction plus terre-à-terre, comme par exemple mener pendant un certain temps un projet expérimental et atteindre quelques étapes ou objectifs fixés par l’acquéreur. Vous pouvez, par exemple, mettre le pied sur l’accélérateur pendant une période de trois mois pour montrer une croissance mensuelle de 100% pour chacun des trois mois considérés.
Afin de prouver la légitimité de la cession du capital de votre entreprise à vendre, vous devrez passer par les fourches caudines de la due diligence. Cela ne se fera qu’après avoir rédigé votre offre de cession, et idéalement veuillez à y inclure une clause de pénalités si l’acquéreur devait se rétracter après l’avoir reçue et acceptée.
Lors de la due diligence (audit interne) vous devrez montrer la solidité structurelle de votre TPME. Cela signifie que vous devrez :
- Établir un tableau de capitalisation clair, indiquant sans ambiguïté les participations (passées, actuelles et futures) au capital de chacun des actionnaires.
- Ouvrir vos livres de comptes afin que l’acquéreur puisse auditer vos données financières.
- Faire asseoir vos avocats aux côtés de ceux de l’acquéreur afin de déterminer le plus complètement possible les risques patents et latents ainsi que les engagements et les responsabilités. Sans oublier de vérifier que votre propriété intellectuelle est convenablement protégée.
- Interviewer et vérifier le background de votre équipe managériale afin de découvrir d’éventuels squelettes dans les placards de chacun. Et également s’assurer que les employés clés resteront à bord.
Estimez les délais
Votre estimation est aussi bonne que la mienne, alors estimez les délais du mieux que vous pouvez et ensuite doublez-les. La transaction de cession du capital (en partie ou en totalité) la plus rapide que j’ai expérimentée a duré environ quatre semaines et la plus longue environ quatre mois. En fait, la structure de votre entreprise, la préparation de votre offre de cession ainsi que la force de votre position de négociation vont déterminer une grande partie du délai, mais il y aura toujours des facteurs externes à prendre en compte.
Par exemple, une fois un acquéreur n’a plus donné signe de vie pendant 45 jours. Au 30ème jour, nous nous sommes résignés au fait qu’il ne réapparaîtrait plus. Puis il réapparut.
Comptez typiquement 1-2 mois pour vous préparer at aligner les équipes d’avocats, 2-3 mois pour mettre en place une offre de cession solide, 1-2 mois de due diligence. Ce n’est pas rapide, mais cela ne doit pas traîner. En général les deux parties (cédant et acquéreur) sont motivées à agir vite, seulement cela prend du temps.
Préparez-vous à l’après startup
La dernière fois que j’ai cédé la majorité des parts de mon entreprise à des investisseurs extérieurs était aussi la première fois que j’avais décidé de rester en fonction pour atteindre un objectif que je m’étais fixé. J’avais gardé le goût de ma position avantageuse au sein de la PME (que j’avais cofondée) et je me figurais pouvoir y rester confortablement et bien rémunéré en tant que Chief Operational Officer (COO). Je n’y suis pas parvenu.
Au bout de deux ans c’était comme si j’avais percuté un mur, ce dont je ne me suis jamais remis, même après quelques mois d’introspection (et de psychothérapie). C’était un mélange de changements internes (imposé par mes nouveaux associés), de facteurs externes, et moi. Chaque matin, j’avais l’impression d’aller travailler avec des boulets aux pieds.
Comme c’était la première fois que j’avais décidé de rester fonctionnel après la cession de mes parts je n’avais pas prévu de plan d’urgence (ou de plan B) et je l’ai payé par la suite. Lorsque je me suis résolu à partir j’ai mis près de trois mois pour retrouver mes marques. J’en ai connu certains prendre bien plus longtemps pour décompresser et j’en ai vu d’autres faire des choses dingues pendant leur décompression comme l’idée folle de concrétiser le projet entrepreneurial qu’ils avaient toujours voulu lancer, maintenant qu’ils en avaient les moyens et personne pour les contredire…
Donc, que vous comptiez rester ou vous enfuir en hurlant, faites en sorte d’avoir sous la main un plan B pour ce qui vous concerne après la cession de vos actions. Vous pouvez envisager ce que vous voulez, peut-être lancerez-vous un nouveau projet entrepreneurial, peut-être assumerez-vous une nouvelle fonction dans une autre TPME, ou même en dehors de l’univers des entreprises. Mais il y a quand même pas mal de chances que vous restiez dans cet univers. Nous, entrepreneurs, sommes comme des drogués ; nous ne savons pas quand il faut arrêter.
Carl-Alexandre Robyn est associé-fondateur du Cabinet Valoro spécialisé dans l’évaluation de startups
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